Fidèles gardiens de la science classique, l’espace et le temps pourraient être congédiés par la nouvelle physique. Contre toute attente, ils ne seraient pas assez fiables pour décrire la réalité.
«
Si vous vous regardez un film à l’envers, vous n’allez voir que de la magie. Il faut savoir que cette magie est compatible avec la physique actuelle, car ses lois fonctionnent dans les deux sens du temps », informe l’ingénieur physicien Philippe Guillemant, chercheur au CNRS et auteur de
La Route du temps. Notre civilisation considère que le temps s’écoule de manière continue, du passé vers le futur. La théorie de la relativité d’Einstein a donc déclenché l’une des plus grandes révolutions de l’histoire des sciences en démontrant que l’espace et le temps sont relatifs. Ces coordonnées se dérobent sous nos pieds !
Exercice de haute voltige mentale, cette remise en question est particulièrement contre-intuitive lorsqu’il s’agit du temps. La course du soleil dans le ciel n’est-elle pas le signe qu’il s’écoule du matin vers le soir ? Dans un sens, oui. Mais la science démontre que selon l’endroit d’où nous observons la réalité, notre appréciation spatiotemporelle sera différente. De plus, le temps émergerait, tout comme l’ensemble de notre monde, d’une dimension… où il n’y a pas de temps ! Ainsi,
« la physique a besoin d’une coordination immatérielle, insensible à l’espace et au temps », déclare le physicien Antoine Suarez, fondateur du Centre for Quantum Philosophy de Zurich. Et comme souvent avec les concepts de la physique quantique, nous retrouvons des idées semblables dans des énoncés spirituels.
« Il fut enseigné par le bouddha, ô moines, que le passé, l’avenir, l’espace physique et les individus ne sont rien que des mots, formes de la pensée, termes du sens commun, seulement des réalités superficielles », rapporte le bouddhiste Madhyamika Karika, repris dans
Le Tao de la physique, ouvrage du physicien Fritjof Capra.
La lumière ne voyage pas en ligne droite, elle prend des virages.
Toute mesure est relative
La relativité générale démontre que l’espace et le temps sont intimement liés et ne forment qu’un continuum indissociable. Nous ne pouvons penser l’un sans l’autre. Tout commence à se gâter lorsqu’Einstein indique qu’ils ne sont pas absolus. En effet, cet ensemble se courbe sous l’effet d’amalgames d’énergie et de matière. Il est par exemple tordu par la présence d’une planète. Ainsi, la lumière ne voyage pas en ligne droite, mais prend des virages selon les distorsions qu’elle rencontre. Cette physique met aussi en évidence que deux observateurs se déplaçant à des vitesses différentes ordonneront les mêmes événements différemment. Le premier peut penser qu’ils sont simultanés et le deuxième qu’ils se produisent l’un après l’autre. Cela fait que toute mesure est relative. Se demander quelle est la taille d’un objet ou la longueur d’un intervalle de temps entre deux événements n’a donc pas de sens. Tout est relatif dans l’espace-temps ! (...)