Au dernier atelier « Introduction à la physique quantique », certains participants ont du se demander quel soudain excès de coquetterie décorative nous avait piqués. En effet, une lampe stylée au profil galbé et oblique, était posée sur la table et diffusait sa lumière douce et colorée. Celle-ci passait par tous les tons de l’arc-en-ciel, selon une programmation complexe et apparemment aléatoire. Ce n’est qu’en fin d’atelier que Morvan Salez a révélé de quoi il s’agissait... C'est vrai, quel rapport entre un éclairage branché et la physique quantique ?
Sciences
En début d’atelier, j'ai sorti de ma poche un dé. Le concept de probabilité est essentiel dans la description des phénomènes, autant dans la physique du XIXe siècle que dans la physique quantique. Du temps de Boltzmann, la probabilité était humaine, synonyme d’incertitude alors que le monde lui, était soumis des lois parfaitement déterministes, une cause n’ayant qu’un effet possible. Prenons le dé. Chaque face peut sortir avec la probabilité 1/6 lorsqu’on le jette sur une table. Ceci est une certitude. On le vérifie avec un très grand nombre de jets, donnant des résultats dans les portions 1/6 pour chaque face. Au terme de six millions d’essais, le « trois » sera sorti près d’un million de fois. C’est l’indéfectible « loi des grands nombres » mais toutefois, à l’instant du jet de dé, l’incertitude est totale.
En physique quantique, un objet qui a plusieurs états possibles est comme un dé qui exhiberait simultanément ses six faces réalisables, et ne cesserait de jouer les indécis que lorsque je le regarde. Dans sa manifestation quantique, le monde est en perpétuelle hésitation, il est réellement indéterminé. C’est l’interprétation « de Copenhague », proposée par plusieurs pères fondateurs de la physique quantique et abondamment validée depuis par les expériences en laboratoire. Cette conception était révolutionnaire, car aux antipodes de notre intuition commune : dans notre expérience quotidienne, nous vivons dans un environnement unique, tangible et stable, et ne percevons pas le caractère éthéré et les valses-hésitations des objets microscopiques.
Très tôt, les chercheurs en parapsychologie ont eux aussi recouru aux probabilités. Parce qu’il est si difficile, pour ne pas dire impossible, de violer la loi des grands nombres, ils employèrent l’analyse statistique pour démontrer la robustesse des effets « anormaux » qu’ils mettaient en évidence, dans des expériences où la non-reproductibilité est, on le sait, la norme. Sur un très grand nombre d’essais, une déviation même faible par rapport à la moyenne statistique, s’avère hautement significative. Dans une expérience où on trouve un écart à la moyenne ayant une chance sur des millions ou des milliards d’être imputable au hasard, alors la réalité de l’effet observé est difficilement contestable.
C’est ainsi que de nombreuses expériences de télépathie, prémonition, ou de psychokinèse (PK) ont très vite intégré les probabilités dans leurs protocoles, faisant appel à des jeux de cartes « Zener », des dés, ou d’autres dispositifs ayant plusieurs « tirages » possibles, mais pour lesquelles les moyennes statistiques sont facilement calculables. Dès les années soixante, la parapsychologie expérimentale a troqué les dés pour des processus physiques aléatoires de nature quantique, tels que l’effet tunnel dans des diodes, ou la radioactivité. La désintégration dans un noyau radioactif est un événement arbitraire (départ d’un neutron) mais dont la statistique est calculable par la mécanique quantique. Pour un grand nombre de désintégrations, on retrouve un taux moyen théorique, la « durée de vie » de l’élément radioactif.
Revenons à notre lampe. Développée par une association créée par des membres du laboratoire PEAR pour sensibiliser scientifiques et grand public aux possibilités d’interaction esprit-matière, elle utilise un générateur de nombres aléatoires (GNA), couplé à un microprocesseur qui traite statistiquement les bits produits par ce générateur, et selon les tendances enregistrées, commande un ensemble de diodes lumineuses. La lampe a plusieurs modes de fonctionnement, dont un qui décrit un cycle de 8 couleurs consécutives dans un sens ou dans l’autre, selon la tendance induite par l’opérateur. C’est cela que les participants de l’atelier ont vu, et c'est cela que nous verrons désormais lors de tous les prochains ateliers, afin de se familiariser avec ce dispositif et de l'expérimenter.
Les générateurs de nombres aléatoires sont des circuits électroniques qui produisent des séquences de bits (valant soit 1 soit 0) de manière totalement « imprédictible ». Mais en moyenne, sur de longues séquences, ils produisent autant de 1 que de 0, et exploitent ainsi le caractère quantique et aléatoire de l’effet tunnel des électrons dans une diode ou un transistor à effet de champ. Bien évidemment, ces GNA sont calibrés : fonctionnant en l’absence d’opérateur émettant une intention, ils doivent produire 50% de 1 et 50 % de 0. Mais l’équipe du PEAR précise qu’on peut exercer son intention à la façon d’un muscle, et qu’il faut une période d’« apprentissage » pour faire du générateur un « point de branchement » entre la conscience de l’opérateur et la réalité matérielle.
D’autres chercheurs ont confirmé indépendamment ce type de résultats : l’esprit semble pouvoir influencer à distance de tels dispositifs. L’intention aiderait en quelque sorte le dé quantique à « faire un choix ». Les préoccupations des chercheurs étudiant la psychokinèse rejoignent donc étonnamment celles des physiciens fondateurs de la physique quantique. Ces derniers s’interrogeaient sur le rôle possible de la conscience dans le passage brutal et irréversible d’une réalité quantique, toute en potentialités, à une réalité incarnée de manière unique et accessible à nos sens. Les expériences de PK montreraient ainsi que l’effet d’intrusion de l’intention dans le processus physique est indépendant du temps et de l’espace. Or c’est également à une indépendance du temps et de l’espace des « corrélations » quantiques, que concluent les physiciens menant des expériences de type Podolsky, Rosen ou Einstein. Lequel Einstein rejetait l’interprétation de Copenhague précisément parce qu’elle aurait impliqué l’existence d’actions à distance instantanées, qu’il qualifiait de « spooky » !
Mais les implications de ces découvertes sont encore plus déroutantes. Des phénomènes aléatoires à l’échelle macroscopique, descriptibles en termes de physique classique, seraient eux aussi affectés par un opérateur. Ce n’est donc pas la taille microscopique caractérisant les phénomènes quantiques qui autoriserait ceux-ci à être influençables par la conscience, mais seulement leur caractère aléatoire « pur ». La conscience, ou le libre arbitre, s’immiscerait dans les lois naturelles par la brèche du hasard, où qu’il se trouve et quelle que soit l’échelle. Voici un argument que ne manqueront pas d’exploiter les joueurs impénitents de casino et de tiercé.
Rendez-vous lors de nos prochains ateliers pour en savoir plus !
Morvan SALEZ est docteur en astrophysique et techniques spatiales. Ancien chercheur au CNRS, il a reçu le prix Antoine d’Abbadie de l’Académie des Sciences pour la réalisation avec son équipe d’un instrument de l’Observatoire spatial Herschel, lancé par une fusée Ariane en 2009. Il s'intéresse à de nombreuses recherches allant de la physique fondamentale à la biologie.
Il est aussi conseiller scientifique, romancier, scénariste, auteur-compositeur interprète, activités auxquelles il se consacr ...
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