L’expérience connue sous l’appellation « vécu subjectif de contact
avec un défunt » (VSCD) semble plus répandue qu’on ne le croit.
Spontané ou provoqué, ce désir de message pose la question du lien
qui perdure post mortem.
Apercevoir la présence lumineuse d’un proche
décédé, sentir sa main se poser sur notre épaule,
reconnaître son parfum qui se diffuse dans la pièce,
recevoir un message de sa part à travers un rêve, un
médium ou une séance d’hypnose... D’après différentes
études, entre 25 et 45 % des Occidentaux
auraient déjà vécu une telle expérience, ce qui fait
dire à Evelyn Elsaesser, auteure du livre
« Quand les
défunts viennent à nous », qu’
« il s’agit là d’un véritable
fait de société ». S’ils demeurent tabous, difficiles
à partager et à admettre dans le cartésianisme de
notre culture, ils n’en sont pas moins vécus comme
puissamment
« réels », bouleversants et réconfortants.
Ces contacts peuvent-ils aider le processus
de deuil, l’acceptation de la mort ou, au contraire,
les freiner ? Faut-il chercher le contact à tout prix
ou accepter qu’il nous échappe ? Médecins et autres
spécialistes du sujet nous éclairent sur la question.
Contacts spontanés
« Soudain, j’ai senti physiquement comme une présence
chaleureuse et bienveillante accolée tout le long de mon
corps. Mon coeur s’est mis à battre très fort. Je savais qu’il
s’agissait de mon père. Puis, cette présence s’est doucement
décollée de moi et m’a laissée dans une sorte d’euphorie
apaisée... Je n’ai jamais oublié ce moment. » Tout
comme Élisabeth, de plus en plus de personnes à
travers le monde osent témoigner de cette expérience
qui échappe pourtant à leur compréhension : celle
d’un
« contact » avec un proche récemment décédé.
Ces expériences déroutantes se produisent généralement
dans les premiers jours suivant le décès, voire
les premiers mois. D’après les recherches menées par
Evelyn Elsaesser, conseillère à l’INREES et cofondatrice
de l’IANDS (International Association for Near
Death Studies), les VSCD les plus courants se manifestent
par un ressenti de la présence
« indéniable »
du défunt. Le contact peut être également sous
forme d’une voix, d’un frôlement, d’une caresse ou
d’une étreinte, d’une odeur caractéristique ou encore
d’une vision.
Notre société
occidentale est unique dans
son scepticisme.
Dans ce dernier cas, la personne disparue
apparaît généralement en éclatante santé et dans
la fleur de l’âge, remplaçant le dernier souvenir parfois
accablant par une image lumineuse.
Les VSCD se produisent parfois au moment même
du décès, en état de veille ou de sommeil, la personne
mourante venant annoncer au récepteur son
départ, alors que celui-ci n’était parfois ni prévisible
ni attendu, comme dans le cas d’un accident.
Des
rêves d’une intensité particulière peuvent être également
le lieu de contacts fulgurants.
« J’ai souffert
pendant plus d’un an du décès de ma mère, raconte
le moine vietnamien Thich Nhat Hanh. Mais un
jour, tandis que je dormais dans la hutte de mon ermitage,
j’ai rêvé d’elle. Je me voyais en train de lui parler.
C’était merveilleux. Quand je me suis réveillé, j’ai eu
la sensation très forte que je n’avais jamais perdu ma
mère. L’impression qu’elle était toujours en moi était très
claire. » Si les VSCD sont généralement très brefs, ils
laissent pourtant des traces durables et positives chez
ceux qui les vivent.
« Pour surprenant que cela puisse
paraître, il s’avère que dans leur très grande majorité, les
personnes vivent cette expérience sans effroi et avec reconnaissance.
La force émotionnelle du VSCD est liée au
fait qu’il arrive par surprise alors que l’on ne s’y attend
pas. Il crée un effet de sidération puis de joie, touchant
directement le coeur », explique Evelyne Elsaesser.
Contacts induits
Si toute personne endeuillée aspire désespérément
à retrouver le contact avec l’être aimé, nombreuses
sont celles qui ne le vivent pas, ou pas spontanément.
L’absence de VSCD peut alors devenir une
vraie souffrance dans le processus de deuil, renforçant
le sentiment d’injustice et de non-sens.
« Elle ne doit
en aucun cas être comprise comme un abandon de la
part du défunt, poursuit l’auteur. Nul ne sait pourquoi
certaines personnes vivent un VSCD et d’autres non.
C’est l’un des mystères qui régissent nos vies et il faut
l’accepter comme tel. » Pour y remédier, certains ont
recours à des consultations médiumniques afin de
tenter de recevoir un message de leur proche décédé.
Quand il est réellement talentueux,
« le médium fonctionne
comme un opérateur téléphonique, une sorte d’antenne pointée vers la conscience non
locale et captant une personnalité défunte attirée par la
présence du consultant », explique la journaliste d’investigation
américaine Leslie Kean.
Dans son dernier
ouvrage,
« Survivre à la mort », elle relate sa propre expérience
auprès d’une médium réputée qui lui livra des
informations précises sur son frère décédé, tout en
restituant parfaitement, par de nombreuses nuances,
la personnalité du défunt. Leslie Kean reçut cette
expérience comme un véritable cadeau :
« Je sentais
que mon frère n’avait pas totalement disparu mais qu’il
est présent d’une manière différente. Ces consultations
ont rempli le vide douloureux de sa mort prématurée
en battant en brèche l’idée de l’irrévocabilité du trépas. »
Outre la médiumnité, de nouvelles techniques
se développent afin d’induire chez les vivants un
contact direct avec un proche disparu. C’est le cas
de la transcommunication hypnotique (TCH) créée
par le docteur Charbonier. Après s’être aperçu que
les individus ayant vécu une EMI avaient été instantanément
libérés de la peur de la mort et de la
souffrance du deuil, il eut l’idée d’utiliser l’état hypnotique
pour faire vivre aux personnes endeuillées
le passage dans le fameux tunnel, l’incursion dans
l’au-delà et le contact avec les êtres chers décédés. Au
final, 67 % des personnes ayant testé cette méthode
disent être parvenues à établir ce contact et avoir reçu
des informations très personnelles.
De son côté, le
psychologue clinicien Allan Botkin perfectionne une
technique voisine, la thérapie CIAM (communication
induite après la mort). C’est en 1995, alors qu’il
aidait des anciens combattants à surmonter leur stress
post-traumatique, qu’il découvrit par inadvertance
que la procédure de l’EMDR pouvait déclencher un
contact avec les défunts.
« Quand les clients atteignent
un sentiment de paix après que leur tristesse a été traitée
et éliminée par la thérapie CIAM, alors leur vibration se
situe à un niveau plus élevé et les défunts peuvent apparemment
les contacter plus facilement. Il s’agit peut-être
tout simplement d’amener le défunt et le vivant sur la
même longueur d’onde », confie-t-il à Leslie Kean. Si
ces différentes techniques, auxquelles s’ajoutent la respiration
holotropique et les voyages chamaniques, ne
peuvent pas garantir directement un VSCD, elles ont
le point commun de provoquer un état de conscience
expansé facilitant le contact avec l’au-delà.
Les VSCD les plus
courants se manifestent par
un ressenti de la présence
“indéniable” du défunt.
Un impact positif
« Laisse-moi partir »,
« Je vais bien »,
« Je t’aimerai
toujours »,
« Je veille sur toi »,
« Ne t’inquiète pas
pour moi »... Les messages reçus lors des contacts
avec les défunts sont généralement empreints
d’amour, rassurants et profondément apaisants,
d’autant plus que les récepteurs ne pensent pas un
instant avoir été victimes d’une illusion ou hallucination.
« J’ai l’intime conviction que ce qui s’est passé
était réel, parce que le bonheur et le bien-être qui m’ont
envahie, je ne les ai pas inventés, mais bien ressentis de
tout mon être », témoigne Michèle. Certaines personnes
reçoivent également des messages de pardon
ou des détails sur les circonstances du décès ou les
raisons d’un suicide, ce qui diminue considérablement
les sentiments d’incompréhension, de colère,
d’injustice et de culpabilité qui ponctuent le processus
du deuil. Enfin, ce qui ressort d’essentiel lors
de ces expériences, c’est la conviction que la vie de
l’être aimé continue de l’autre côté.
« Les conseils des
défunts de ne pas les pleurer trop longtemps et de poursuivre
notre vie en attendant d’être réunis un jour sont
d’une importance capitale dans le processus de deuil.
En cela, les VSCD sont thérapeutiques par nature »,
soutient Evelyn Elsaesser. (...)