On connaissait l'effet placebo de certaines substances. Mais savez-vous que les convictions de votre médecin envers un traitement influencent son efficacité ? Explications avec le Dr Patrick Lemoine, psychiatre et docteur en neurosciences.
Une définition du placebo/nocebo ?
Un placebo est une substance inerte – sucre, lactose, etc. – donnée dans un contexte thérapeutique. L’effet placebo, c’est l’écart mesuré entre l’effet prévisible et le résultat constaté. Il est dit placebo quand il est bénéfique, nocebo lorsqu’il est néfaste.
Quel est son rôle dans la médecine d’aujourd’hui ?
Beaucoup plus important qu’on ne le pense, à la fois pour les médicaments et les médecins. Environ 40% des remèdes distribués n’ont pas prouvé leur efficacité. Par ailleurs, des études ont montré que l’attitude du thérapeute est déterminante. Lorsqu’un soignant prescrit un traitement dans un domaine qu’il aime et auquel il croit, il aura un effet placebo-inducteur. Dans un domaine qu’il n’aime pas, il sera nocebo-inducteur.
La conviction du médecin est donc aussi importante que la croyance du patient ?
Oui. Je raconte souvent l’histoire du D
r Stewart Wolf, un médecin américain réputé. Dans les années 60, il découvre l’existence d’un médicament non commercialisé contre l’asthme. Il commande un échantillon et le prescrit à un patient gravement atteint. Les effets sont immédiats. Ce dernier ne fait plus de crises pour la première fois depuis dix-sept ans. Etonné, le D
r Wolf réclame à la firme un placebo. Deux jours après l’avoir avalé, le patient rechute. Cinq allers-retours entre placebo et médicament donnent tous un résultat favorable au vrai comprimé. Le médecin, enthousiaste, fait part de ses observations au laboratoire, qui répond: « Depuis le début, nous ne vous avons fourni que des placebos. »
Comment est-ce possible ?
En réalité, le cerveau est capable en permanence de synthétiser tous les médicaments nécessaires pour guérir à peu près n’importe quelle maladie, ce qui nous permet de ne pas être tout le temps malades. Entre autres circonstances, ce mécanisme auto-thérapeutique se déclenche dans le cadre d’une relation de confiance entre un médecin convaincu de ce qu’il propose et un patient qui a de fortes attentes. Quand le D
r Wolf prescrit le placebo, le patient décrypte les signes non verbaux d’une absence de conviction.
Le placebo a-t-il un effet sur tout le monde ?
Absolument. Y compris d’ailleurs les nourrissons et les animaux. Ce n’est pas lié au quotient intellectuel du patient, ni à une forme de névrose. Au contraire, ça fonctionne mieux avec des sujets parfaitement sains d’esprit.
Et le nocebo alors ?
Les mécanismes sont les mêmes, sauf que l’effet est inversé. Pour des raisons qu’on ignore, au lieu d’avoir une action bénéfique, les substances produites par le corps ont des conséquences néfastes. Mais là encore, le phénomène est fortement corrélé à l’attitude du soignant. On observe des effets nocebo quand les rapports avec le patient sont mauvais, si le médecin n’a pas d’attente ou qu’il ne croit pas au médicament prescrit.
Quelle est la plus grande découverte en médecine ?
La vaccination et j’espère bien qu’un jour (je suis sérieux) il y aura des vaccins contre la schizophrénie, l’autisme, le trouble bipolaire...
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