Même si, aujourd’hui, peu de personnes diraient croire en une véritable incarnation du diable (33 % des Français uniquement, selon un sondage Le Monde du 10 janvier 2007), il n’en reste pas moins que l’idée d’égarement, de jugement ou encore de petites haines ordinaires peut hanter tout un chacun. Au cœur d’un cheminement spirituel, que représente « le mal » ?

Sans doute le reflet d’une souffrance – subie, infligée, issue de l’ignorance ou encore d’une jouissance négative –, la figure du diable nous invite à regarder en face ce qui nous effraie. Source des erreurs, exaltation du corps jusqu’à en perdre la raison, exaspération des penchants les plus vils dans le désir de puissance et de vengeance, oraison de l’ego qui éloigne de l’amour de son prochain, les métaphores du Malin se glissent dans notre quotidien et deviennent très concrètes lorsque l’on examine son âme. Le diable est un révélateur sous toutes les coutures, et libre à nous de vouloir voir ou non la lumière noire qu’il révèle.

L’idée de la chute et de la désobéissance

Lucifer aurait été un ange, peut-être même le préféré, auprès de Dieu. Mais il aurait failli, il aurait trahi, il aurait même voulu égaler Dieu. Ainsi, il aurait été banni par un Dieu qui punit. C’est l’histoire la plus communément admise concernant l’origine du diable. L’origine du mal en somme, la désobéissance ? Dans la Bible, Isaïe décrit un ange déchu qui s’est voulu l’égal de Dieu (14 :12-5 : Te voilà tombé du ciel, Astre brillant, fils de l’aurore ! Tu es abattu à terre, Toi, le vainqueur des nations ! Tu disais en ton cœur : Je monterai au ciel, J’élèverai mon trône au-dessus des étoiles de Dieu ; Je m’assiérai sur la montagne de l’assemblée, À l’extrémité du septentrion. Je monterai sur le sommet des nues, Je serai semblable au Très-Haut. Mais tu as été précipité dans le séjour des morts, Dans les profondeurs de la fosse.)

Selon les traditions juive, chrétienne et musulmane, il existe d’ailleurs d’autres anges déchus, ayant eu les mêmes velléités ou bien ayant juste désobéi, s’approchant du mal, de la noirceur, du mensonge aussi, de la perfidie. Satan est le plus connu. Quelles que soient les croyances, le thème reste le même : il ne faut pas défier Dieu. Lucifer signifie littéralement « porteur de lumière » en latin, ce qui est étrange pour un ange de la noirceur. Satan, c’est stn en hébreu, l’adversaire, celui qui fait obstacle au chemin vertueux qui mène à la félicité. Tous ces actes de défiance vis-à-vis de la perfection de Dieu ne sont pas sans rappeler la destinée humaine : comment ne pas s’égarer sur le chemin ? (...)