Nombre d’or, suite de Fibonacci, fleur de vie, solides de Platon…
La géométrie dite sacrée est partout autour de nous, dans le visible et
l’invisible, dans l’infiniment petit comme dans l’infiniment grand. Elle a
nourri l’art et l’architecture, mais c’est bien de la nature
et de son observation qu’elle est née.
Comme l’a dit Albert Einstein,
« il
n’y a que deux façons de vivre sa
vie : l’une en faisant comme si rien
n’était un miracle, l’autre en faisant
comme si tout était un miracle. »
Il en va de même avec la géométrie sacrée : soit elle
est partout dans la nature, soit elle n’est nulle
part. De fait, elle est partout puisque c’est de
l’observation de la nature que les hommes ont
déduit cette géométrie :
« Les cristaux, les fleurs,
les fruits, les animaux, tous ont servi de modèle
pour créer cette géométrie particulière », écrit
Stéphane Cardinaux, architecte et chercheur
en géobiologie. La nature étant considérée
comme une perfection, l’être humain peut en
comprendre les lois d’organisation géométrique
et s’en inspirer pour ses propres créations.
Divina proportione
Que l’on tranche un concombre, un chou, que
l’on considère la spirale d’une coquille de mollusque
ou bien la symétrie de l’étoile de mer, les
mêmes proportions vont s’exprimer, et une en
particulier : la
« divina proportione » de Luca
Pacioli, mathématicien et moine franciscain
italien du XVe siècle. Celui-ci en parlera comme
d’un « trésor caché », qui renvoie à une
« science
secrète », car les caractéristiques de la proportion tiennent à Dieu. Le premier est l’unicité… »,
écrit-il. Cette proportion divine est connue depuis
Euclide selon la règle :
« Une droite est dite
divisée en moyenne et extrême raison quand toute
la quantité est au plus grand segment comme ce
dernier est au plus petit. » Si l’on bâtit un rectangle
avec le long segment pour base et le court
segment pour côté, on obtient un rectangle d’or.
La proportion ne prendra l’appellation de
« nombre d’or » qu’au XIXe siècle, désigné par la
lettre grecque ? (phi). Sa valeur est de 1,618…
Il intervient dans la construction du pentagone
régulier, dans certaines phyllotaxies (arrangement
des feuilles d’une plante) ou encore dans le
« pavage de Penrose », un modèle de structure des
quasi-cristaux. C’est Johannes Kepler, vers 1600,
qui va découvrir les relations entre la section
dorée et les nombres de Fibonacci. La fameuse
« suite de Fibonacci » est en effet très simple ; il
s’agit d’ajouter les deux termes précédents pour
obtenir le suivant, en partant de 0 et 1 : suivent 1,
2, 3, 5, 8, 13, 21, 34, 55…, et le rapport de deux
termes consécutifs tend vers phi. La preuve que
cette suite se trouve dans la nature est que Fibonacci
l’a découverte en se demandant combien de
paires de lapins pouvaient être « produites » par
une seule paire en un an, en supposant que tous
les animaux survivent. Chaque paire engendre
une nouvelle paire chaque mois, et pour compter
il suffit d’additionner les paires des deux mois
précédents, pour arriver à 377 paires à la fin de
l’année.
Modèle de croissance équilibrée
En 1202, Leonardo Fibonacci a écrit le Liber abaci,
soit le livre du calcul, ou de l’abaque, un des
premiers à introduire les chiffres arabes en Europe
occidentale. Il combine cette connaissance
avec ses propres réflexions.
Géométriquement,
la suite de Fibonacci s’exprime en une croissance
de carrés de taille 1, puis 2, 3, 5, etc. En traçant
dans chaque carré un quart de cercle de rayon
égal au côté, on forme une spirale qui croît indéfiniment.
Contrairement à une idée reçue, la
spirale logarithmique de la coquille du nautile ne
repose pas sur le nombre d’or, mais c’est bien le
cas de l’arrangement des graines de tournesol, des
pétales de rose ou des écailles d’une pomme de
pin. La géométrie sacrée du nombre d’or, même
si elle n’est pas omniprésente, se trouve à toutes
les échelles, puisque cette suite peut également alimenter une géométrie fractale qui génère la répétition
d’objets
« auto-similaires » à différentes échelles.
Les caractéristiques de
la proportion concordent
avec les attributs qui
appartiennent à Dieu.
- Lucas Pacioli
Selon Michael Schneider, mathématicien et auteur
d’un respecté The Beginner’s Guide to Constructing
the Universe,
« cette séquence de nombres permet une
croissance par expansion continuelle mais très équilibrée.
C’est un motif de croissance expansive que l’on
retrouve partout dans la nature et dans la vie organique.
Aussi bien la position des branches
sur certains arbres que la croissance du
chou, des cornes de bouquetin ou des galaxies…
La croissance de la coquille du
mollusque ne modifie pas son centre
de gravité, comme pour les cornes du
bouquetin, et donc maintient son
équilibre. » Quand la disposition
de feuilles consécutives sur une tige
forme un angle de 137,5° environ,
correspondant à
« l’angle d’or », l’arrangement
global permet qu’aucune feuille
ne se retrouve complètement au-dessus d’une
autre, ce qui maximise à la fois la captation des
rayons du soleil et de l’eau de pluie. Il faut souligner
que toutes les plantes ne suivent pas ce motif de
croissance, mais celles qui le font en tirent ce profit,
tout comme les graines de tournesol rangées sur la
fleur en utilisant le maximum de la surface.
Critères de beauté et d’harmonie
Les spirales qui s’observent dans des plantes comme
le chou, l’artichaut ou le tournesol peuvent être
comptées dans un sens et dans l’autre : on trouve
toujours des paires de nombres de Fibonacci consécutifs
comme 34 dans un sens et 55 dans l’autre, ou
bien 55 et 89, ou 89 et 144, etc. Le fameux chou
romanesco est quant à lui l’exemple d’une spirale
fractale puisqu’on retrouve le même motif aux différentes
échelles. Le nombre d’or permet également
de construire le pentagone régulier et l’étoile qui en
est issue, le pentagramme. On le retrouve dans la
pomme tranchée par le milieu, qui fait apparaître
cinq loges à pépins. Ce pentagramme est un principe
féminin qui symbolise Vénus, à la fois planète et déesse. Au Moyen Âge, le pentacle servait à repousser
les démons, et on retrouve cette étoile sur
les drapeaux américain ou européen, celui de l’islam
ou de l’Union soviétique…
On va
également lire
l’arbre de vie
séphirotique de la
kabbale dans
cette fleur
de vie.
Selon le chirurgien californien
Stephen Marquardt, la divine proportion
fonde les critères de beauté d’un visage et l’harmonie
entière du corps :
« La distance qui sépare le nombril
du sol et celle entre le nombril et la tête sont dans
un rapport de proportion entre 1 et 1,618,
explique-t-il. Et cela est également vrai
pour d’autres parties du corps comme les
segments des jambes, le haut du corps,
le buste, le cou et la tête, les phalanges,
etc. Au niveau du visage, la largeur de
la bouche correspond à 1,618 fois celle
du nez sur les visages que nous avons
tendance à trouver beaux, et la largeur
de la base du visage est 1,618 fois
celle de la bouche. C’est valable pour le
triangle du nez, de face ou de profil, et même
les dentistes ont constaté que les incisives latérales
sont 1,618 fois moins larges en moyenne que les incisives
centrales. » Marquardt est connu pour avoir mis
au point un
« masque de beauté » en appliquant ces
règles de proportion à toutes les parties du visage.
L’astrophysicien d’origine roumaine Mario Livio a
également publié un livre sur le nombre d’or et se
demande dans Dieu est-il mathématicien ? comment
il est possible que les développements abstraits des
mathématiques finissent toujours par trouver une
application. N’est-ce pas la preuve qu’elles sont tout
simplement le langage de la nature ? (...)