Parler d’optimisme au temps de la Covid-19 ? Rien de plus (im)pertinent !
Loin de l’image naïve qui lui colle à la peau dans notre société, il retrouve toute sa noblesse avec l’entrepreneure Catherine Testa. Levier de transformation, puissance d’action, l’optimisme, par l’ouverture qu’il crée, nous connecte avec un vaste réservoir de possibles.
Il y a des entretiens qui font du bien. Incontestablement, partager une heure trente avec Catherine Testa en fait partie ! Même en visio, énième confinement oblige, son élan crève l’écran. Personnalité à haute sensibilité, connectée au propre comme au figuré, elle a toujours eu la passion comme moteur, avec un train d’avance sur les tendances. Il y a plus de dix ans, elle s’investit précocement dans le développement durable, en créant un vaste réseau de New York à Pékin. Passionnée par le digital, convaincue qu’il s’agit d’un moyen de changer les choses, elle travaille ensuite dans l’innovation. Sur ces thématiques, elle comprend vite que nous sommes capables du pire comme du meilleur...
Catherine Testa perçoit la crise de sens qui pointe dans la société. Une idée germe qui rassemble tous ses talents : créer un site 100 % positif et (oser) parler d’optimisme. «
Non pour regarder la vie avec des lunettes roses, mais pour mettre en avant les initiatives positives », dit-elle. En 2016, elle lance loptimisme.com. L’engouement est immédiat. Suivent un best-seller,
Osez l’optimisme, et un autre site dédié au futur du travail, loptimisme.pro, « chaudron » d’entreprises engagées. Mue par l’enthousiasme, elle nous invite à devenir acteurs du changement. «
Essayez... au pire, ça marche », conseille-t-elle malicieusement.
Il faut de l’audace pour parler d’optimisme
dans le désenchantement ambiant. Quel optimisme prônez-vous ?
Oui, ça peut même paraître indécent. Mais en tant qu’entrepreneure engagée, je suis convaincue que la société peut changer par la somme des actions individuelles. Je ne parle donc pas d’optimisme comme le
ferait une philosophe, une psychologue ou un médecin, je prône l’optimisme d’action. Selon moi, il est le prérequis à toute action. Retrouver le goût de l’optimisme est essentiel, encore plus dans la crise que nous traversons et surtout en France où il est confondu avec
sa caricature. Non, l’optimisme ne relève pas de la naïveté : un optimiste n’est pas un imbécile heureux. Et non, l’optimisme ne signifie pas nier la réalité. J’utilise différents canaux pour lui redonner ses lettres de noblesse et le diffuser : podcasts, livres, conférences, dessins que je publie sur les réseaux sociaux. Avec, comme message : « Rendez-vous compte que nous avons les moyens d’agir, à titre personnel et collectif ! » Pour moi, il est plus important d’éveiller à l’optimisme que de transmettre des trucs pour être optimiste. La clé est d’incarner l’optimisme. En conscience.
À ce propos, dans les circonstances qui sont les nôtres, êtes-vous optimiste ?
Je suis pessimiste face aux systèmes et très optimiste vis-à-vis des gens. Je ressens un sentiment d’impuissance face à la lenteur de la transition sociétale, aux dysfonctionnements et à la souffrance que j’observe, en entreprise notamment. Par contre, je suis optimiste quand je rencontre au quotidien ceux qui agissent, qui transforment leur vie, qui s’alignent, qui osent exprimer « qui » ils sont... ceux qui changent aussi les structures en interne, en mettant en place de nouvelles cultures d’entreprise, plus centrées autour de vraies valeurs. Quand je vois la beauté de l’humanité – parce qu’elle est bien présente cette beauté –, ceux qui se donnent aux autres, qui s’engagent, ça me rend très optimiste ! Il est temps de se réapproprier notre souveraineté individuelle. Oser agir ! Ce n’est pas simple car on nous a longtemps cantonnés au rôle d’exécutants. Il ne fallait surtout pas sortir des cases. La période n’en est plus là, elle est à l’expression d’une intelligence humaine et collective.
Retrouver le goût de l’optimisme est essentiel, encore plus dans la crise que nous traversons.
Il n’est pas facile de se relier à cette intelligence collective avec les clivages qui s’exacerbent dans la société, surtout au cœur de cette crise sanitaire...
Au-delà même de ça, nous sommes dans une société de déficit de confiance. Autrefois, on donnait sa confiance au maire, à l’instituteur, au prêtre, au médecin. Aujourd’hui, quand vous allumez la télé, vous avez deux médecins qui s’emplâtrent, deux politiques qui s’insultent... Nous avons tous une illusion de la réalité, en fonction de nos prismes médiatiques. Cet Internet censé nous ouvrir sur le monde nous renferme sur notre propre vision. J’ai deux téléphones : l’un est sur un réseau classique, connecté à des médias traditionnels, l’autre, très alternatif. Autant dire que si je consulte les deux téléphones, quelles réalités différentes ! Nous vivons dans des réalités parallèles, que l’on se choisit. Mais si on prend conscience qu’on ne va pas nous donner la confiance de l’extérieur, cette période est peut-être une formidable opportunité pour se la réapproprier. Nous sommes tous un « sachant », certes limité, mais il est essentiel de se faire confiance. Notre monde intérieur est la seule chose dont on soit sûr... même s’il est sacrément agité ! (...)