Pourquoi la voyance n’est-elle pas reconnue sérieusement ? La célèbre voyante Maud Kristen, qui milite activement pour la reconnaissance de sa profession et pour une étude scientifique rigoureuse des capacités extra-sensorielles, revient sur l’histoire de cette pratique qu’elle considère comme « une des formes de l’intelligence ».
Perceptions
Voilà plus de vingt ans que ma principale question consiste à trouver les moyens de réhabiliter la voyance comme une des formes de l’intelligence. Une intelligence très différente de toutes les autres puisque — si étrange et mystérieux que cela puisse paraître — elle n’a pas besoin des perceptions sensorielles pour s’exercer. Paradoxalement, ce qui rend mon travail difficile, ce n’est pas de produire des phénomènes de voyance, c’est d’arriver à ne pas les laisser se transformer en autre chose que ce qu’ils sont dès qu’ils se retrouvent importés dans le champ social.
Pour atteindre mon objectif, je me risque à des démonstrations télévisuelles, je collabore avec des chercheurs en parapsychologie et en sciences humaines, j’interviens dans des universités, je participe à des colloques animés par le CNRS, je tente de comprendre comment se pratique la voyance dans d’autres cultures, et, depuis peu, j’ai réussi à la rendre présente dans l’art contemporain.
Mais, en vingt ans, rien n’a vraiment changé : la France est un des seuls pays d’Europe à ne pas subventionner de laboratoire de parapsychologie, la voyance déchaîne toujours les passions entre ceux qui « y croient » et ceux qui « n’y croient pas ». Elle n’arrive pas à devenir un objet d’étude scientifique et reste donc enclavée dans un territoire passionnel d’où toute raison est bannie. Lieu de fascination ou de rage, coincée entre la terreur qu’elle inspire et les ricanements qu’elle suscite, elle semble condamnée à rester raptée par de « faux experts » qui la réduisent à quelque chose d’acceptable pour leur représentation du monde. En outre, elle reste majoritairement pratiquée par des professionnels qui conjuguent le champ sémantique des bénévoles avec celui du marketing direct dans un double langage qui la discrédite irrémédiablement.
J’anime depuis peu une formation destinée à découvrir et à développer ses capacités extrasensorielles. Au bout de quelques sessions, grâce à une mise en condition — quelques exercices de mémorisation et de relaxation — j’ai tendu à mes élèves la photo d’un pavillon de banlieue tout à fait ordinaire. Pour ne pas risquer de les influencer, je suis sortie de la pièce en leur disant : « Interrogez votre sixième sens, demandez-lui ce qui s’est passé entre ces murs et écrivez ce que vous ressentez ». La maison en question était celle de Landru, le célèbre criminel. Plusieurs d’entre eux m’ont remis des copies qui racontaient précisément le drame : la séduction des femmes, leur assassinat, mais aussi la façon dont Landru faisait disparaître les corps. Ces expériences ne sont pourtant pas extraordinaires. J’ai eu l’occasion en 2005, de vivre la même chose lors d’une émission de télévision dans laquelle j’initiais trois inconnus à la voyance. Pourtant, dans notre culture, la voyance, c’est-à-dire la télépathie, la clairvoyance et la précognition ne sont pas supposées exister en tant que telles. En lisant Méheust et Stengers, j’ai compris que notre culture avait produit des dispositifs intellectuels destinés à réduire efficacement les capacités psychiques non conventionnelles à ce qu’elles ne sont pas : une comédie, des coïncidences, de simples effets de sens, des symptômes de pathologie psychiatrique, un commerce douteux.
Oui, la voyance est envoûtée. Parce qu’elle se laisse manipuler dans le sens du désir de ceux qui se liguent pour qu’elle reste une pratique critiquable et subalterne, pour ne pas avoir à l’étudier.
Mais qui sont les envoûteurs ? D’abord, bien sûr, les rationalistes militants qui tentent à travers leurs interventions médiatiques de maintenir le clivage du « Vous croyez, vous, le peuple ignorant » et « Nous savons, nous les scientifiques ». Leur objectif est de dissimuler que la très sérieuse American Association for the advancement of science (ou AAAS) a reconnu la parapsychologie comme un objet d’étude scientifique depuis 1969. Ils usurpent ainsi la place des experts : les chercheurs en parapsychologie qui travaillent véritablement sur ses questions. Leur tactique consiste à pratiquer l’injure à l’encontre de leurs adversaires, les transformant en « charlatan » pour ne pas devoir discuter avec eux, utilisant ce vieux truc que les sorcières font aux princes changés en crapauds pour que les princesses ne les embrassent jamais : les rendre répugnants. Ces grands insulteurs publics se livrent en général à un numéro de cirque qui n’échappe pas toujours aux spécialistes, utilisant les méthodes dont ils accusent l’adversaire : l’approximation intellectuelle, les démonstrations spectaculaires, les conclusions simplistes. Aussi passionnés et naïfs que les créationnistes, ils semblent toutefois en voie de disparition progressive, leur vision dix-neuviémiste de la science n’étant plus assez sophistiquée pour résister aux subtilités épistémologiques de l’ère post-moderne. (...)
Maud Kristen est voyante et sujet psi. Née en 1964, elle a fêté en 2017 sa trentième année d’exercice professionnelle.
De réputation internationale, sa grande notoriété s’est construite sur un travail constant de réhabilitation de la voyance.
Largement médiatisée, elle se prête également à des expériences parapsychologiques comme le montre le documentaire 6ème sens, la Science face au Paranormal de Marie-Monique Robin. Auteure de sept ouvrages dont Pour en finir avec Madame Irma, Fille des Eto ...
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