Pour les anciens, la vie céleste et la vie terrestre étaient
en symbiose étroite. L'action des astres, leur influence sur les
événements humains, les bribes d'avenir que les dieux y inscrivaient furent des interrogations essentielles. Une histoire superbement illustrée de l'astrologie.
Introduction
« Si l'on n'avait eu le crédule espoir de lire l'avenir dans le ciel, auriez-vous jamais été assez sage pour étudier l'astronomie pour elle-même ? » Johannes Kepler (astronome allemand, 15-71-1630).
Il y a cinq mille ans, les hommes ont appris à lire dans le ciel étoilé.
Pour les anciens, la vie céleste et la vie terrestre étaient
en symbiose étroite. L'action des astres, leur influence sur les
événements humains, les bribes d'avenir que les dieux y inscrivaient furent des interrogations essentielles. L'astronomie, science des astres, naquit de l'envie de percer les secrets du ciel. L'astrologie -
« discours sur les astres » - en a été pendant des siècles l'expression concrète.
Avec les Lumières, la primauté de la science et de la raison, elles se tournèrent le dos. Jusque-là, pendant près de quatre mille ans, prédire la destinée des peuples selon des configurations astrales voulues par les dieux revêtait un caractère universel.
Cette - petite - histoire de l'astrologie pour néophytes n'est ni un traité ni un essai. Elle n'a d'autre intention que de rappeler comment, par la magie du ciel, se sont développées, du côté de la Mésopotamie, les premières représentations du monde. Comment des prêtres-astrologues, dans le secret des dieux, ont scruté le ciel consciencieusement pour en tirer des présages
destinés à leurs rois. Parallèlement se forgeaient les outils pour mesurer le temps, maîtriser les saisons et les travaux agricoles qui nourrissaient les hommes.
Cette astrologie naturelle se doublait d une astrologie dite « judiciaire », qui jugeait de la destinée des peuples. De cette époque lointaine, provient le bestiaire fantastique qui a rempli la voûte céleste, et dont les scientifiques aussi ont conservé des noms de constellations dont les premières furent dessinées à Babylone. De là est né également le zodiaque que les savants, mathématiciens et philosophes grecs, initiés par les prêtres babyloniens, ont pris pour modèle.
Avec eux, l'horoscope devenait individuel pendant que s'esquissait une astrologie savante qui n'a cessé de faire débat depuis. En essaimant chez les Romains et en Méditerranée, cette pratique parvint à se diffuser auprès des élites comme dans le peuple . Elle n'en fut pas moins confrontée de façon récurrente à des interdits. Le monothéisme chrétien la rejeta comme toutes croyances païennes, et elle disparut pour plusieurs siècles. Avec les Arabo-persans, leurs traductions des textes grecs et les perfectionnements apportés, l'Occident renoua au Moyen Âge avec une astrologie cousine de l'astronomie, ou sa
« fille folle » selon Kepler. Les grands du monde, papes, rois et des scientifiques eux-mêmes, pratiquaient alors les deux astrologies, savante ou magique.
Des découvertes majeures dès la Renaissance ont ébranlé un système antique qui maintenait l'homme dans la bulle protectrice d'un univers fini. L'hyperscientisme et la raison auraient du le détourner de ses vieilles lunes. Il n'en fut rien. L'astrologie s'est maintenue au gré de disputes qui ont toujours cours. Ésotérique au XIXe siècle, elle s'est popularisée au XXe avec l'horoscope. On n'en cesse pas moins de s'interroger sur l'avenir d 'une connaissance
« qui a aidé l'homme à penser pendant des millénaires » (Claude Lévi-Strauss). Tandis que les scientifiqu es estiment la destinée des galaxies et de l'univers, certains astrologues du XXIe siècle veulent réhabiliter un art héritier d'une vieille tradition, l'extraire des croyances magiques, la rendre crédible en la façonnant à l'aune de nouvelles disciplines. Plus qu'aux incertitudes de l'homme sur sa destinée, cette astrologie voudrait revenir à un de ses fondements : réfléchir au lien mystérieux de l'homme avec le cosmos, ce ciel devenu infini, silencieux et rempli d'étoiles, dont la seule observation est la promesse d'une intense émotion.
Avec les Grecs : Les bases de l'astrologie savante
Six siècles av.J.-C., on imaginait encore une Terre plate et circulaire, recouverte d'un dôme céleste planté d'étoiles. Puis Pythagore inventa le terme de cosmos pour désigner le ciel, évoquant aussi l'idée que la Terre était ronde. Le monde grec d'alors continuait d'être pétri de mythes et de croyance en l'essence divine des planètes. Les puissants, eux, ne décidaient
jamais sans aller au temple consulter les oracles. Le contact avec les Babyloniens, leurs observations du ciel et leurs connaissances astrales, participa grandement au développement de l'astronomie par les Grecs.
La description du ciel se fit plus rationnelle au fur et à mesure que se développaient les mathématiques, la trigonométrie et la géométrie. Pour autant, la rationalité grecque composa aussi avec une philosophie remplie de symboles sur la nature, et avec la mystique astrale (les âmes astrales d'Aristote par exemple), ce dont les différentes écoles philosophiques débattirent longuement au fil des siècles. En même temps que de savants calculs posaient les bases de la science astronomique, des philosophes tels que les pythagoriciens, à la vision mathématique et mystique de l'univers, et les stoïciens - pour qui le déterminisme des phénomènes naturels rendait possible de prévoir le destin - donnèrent une crédibilité à l'astrologie importée d'Orient.
Avec eux, dès le IIIe siècle av. J.-C., une religion astrale archaïque prenait les allures d'une science plus rigoureuse, l'astrologie savante, dont les contradictions sont restées d'actualité.
Au zodiaque, déjà connu dès le VIc siècle av. J.-C., on ajouta quatre éléments (eau, terre, feu, air) et le chaud, le froid, le sec, l'humide associés aux tempéraments. Au I°er siècle av. J.-C., l'invention des tables d'ascension des astres permit, avec les almanachs et les éphémérides, de connaître les positions des planètes, pour une heure et un lieu donnés, sans avoir à observer le ciel. Dresser un horoscope était devenu mathématique, et c'est avec les Grecs qu'il s'individualisa.