Véritable tornade scientifique, la mécanique quantique provoque des remises en question abyssales. Et bien que nous ayons encore du mal à la comprendre, elle a pourtant envahi notre quotidien.
« Ce n’est pas un peu loufoque tout ça ? », entendons-nous parfois lorsque le sujet de la physique quantique est évoqué. Sur les vingt-neuf participants au congrès Solvay de 1927, où furent vivement discutés les principes de cette nouvelle science de l’infiniment petit, dix-sept étaient titulaires du prix Nobel ou futurs lauréats. Non, la physique quantique n’est pas une facétie. Elle repose sur un formalisme mathématique solide et cohérent, maintes fois mis à l’épreuve par diverses expériences incontestées. De plus, elle a donné naissance à un panel technologique dont notre monde ne pourrait plus se passer.
Cependant, il est juste de remarquer qu’elle nous pose problème. Pourquoi ? D’une, parce qu’elle révolutionne notre façon de voir le monde.
« C’était comme si le sol s’était dérobé sous nos pieds, sans aucune fondation visible nulle part où l’on eût pu construire », a retracé le physicien Albert Einstein, père de la relativité générale et grand contributeur quantique. De deux, parce qu’elle n’est pas aisée à comprendre.
« Ceux qui ne sont pas scandalisés en découvrant la théorie des quanta ne peuvent sûrement pas l’avoir comprise », s’était exclamé le physicien Niels Bohr, figure majeure de l’édification de la physique quantique. De trois, parce qu’elle est sujette à de nombreuses interprétations. Bohr et Einstein, en grands pontes des quanta, ne sont par exemple jamais tombés d’accord sur ce qu’elle implique quant à la nature de notre réalité. Rien que ça.
Une science mystérieuse
La physique quantique nous enseigne que notre réalité ne peut plus être vue comme étant mécanique, prévisible, ni même solide, qu’il nous faut penser en termes d’énergie et d’information, de relativité et d’aléatoire, d’intrication et de non-localité. Elle nous apprend que l’observateur joue un rôle essentiel dans le résultat des expériences… Le vertige est garanti. Indiscutablement, la théorie quantique nous met face à un changement de paradigme majeur, tant sur le plan scientifique que sur le plan humain. Avons-nous achevé cette conversion ? Pas entièrement. Cette science étonnante reste encore majoritairement incomprise du grand public. Surtout, le débat parmi les scientifiques sur les implications profondes de ses découvertes reste ouvert.
« Les formalismes utilisés par les physiciens soulèvent de difficiles questions d’interprétation que les physiciens eux-mêmes sont incapables de résoudre sans une réflexion philosophique approfondie », pointait le physicien français Bernard d’Espagnat dans son livre
Le Monde quantique.
Par conséquent, au-delà d’un accord commun solide, il existe plusieurs interprétations quantiques plus ou moins divergentes : interprétation de Copenhague, théorie quantique des champs, théorie de la gravitation quantique à boucles, d’autres tentatives comme la théorie des cordes, la théorie des univers multiples émanèrent aussi de ces découvertes… La recherche continue, surtout que le Graal est la réunion de la relativité d’Einstein et de la mécanique quantique en une seule théorie.
Ce que la physique quantique questionne n’est rien de moins que la nature de notre réalité...
Une révolution concrète
Sans que nous nous en soyons véritablement rendu compte et bien qu’elle soit partiellement incomprise, la physique quantique a envahi notre quotidien. Aujourd’hui, il n’existe quasiment aucune industrie qui ne profite de ses résultats. L’invention du transistor – base de toute l’électronique et de l’informatique – en est un exemple. Que serait notre monde actuel sans ce procédé quantique ? La physique nucléaire est ainsi
« cette discipline mystérieuse et troublante qu’aucun de nous ne comprend vraiment mais que nous savons utiliser », pointe le physicien Murray Gell-Mann. Et c’est justement parce qu’elle fonctionne qu’elle nous pousse d’autant plus vers une révolution philosophique.
Le challenge est de taille. Ce que la physique quantique questionne n’est rien de moins que la nature de notre réalité et le rôle que joue notre conscience dans son apparition. De nombreux scientifiques ont ainsi souligné que cette mécanique nécessite l’élaboration de concepts dont la similarité avec les enseignements spirituels est frappante. La science peut-elle rejoindre la spiritualité ?