De la passion à la fusion
en passant par la séparation, les
amours des flammes jumelles sont
le plus souvent shakespeariennes.
Parfois, le
happy end dément les
rumeurs d’un bonheur impossible.
Un parcours du combattant qui
s’avère être un voyage initiatique,
une ascension vers l’Amour de Soi.
L’histoire d’amour finit bien, si à
la fin, chacune des flammes s’aime
elle-même et si… les deux vibrent
sur la même longueur d’onde.
Ensemble, elles pourront alors
faire battre le cœur de la Terre au
diapason de l’Amour inconditionnel.
C’est la version conte de fées.
Mais qu’en est-il du « conte réalité » ? Quand on se glisse dans les
coulisses d’un scénario idéal, on
découvre à quel point l’amour fait
mal. Un temps ou tout le temps ? Cela dépend…
Les racines du mal : séparées à l’origine
Si l’amour nous saisit le plus
souvent sans crier gare, il est de
ces histoires qui embrasent les
cœurs et s’engramment dans les
mémoires avant même leur incarnation.
C’est une évidence
pour Marie Sahuguede, auteure
d’un ouvrage sur les flammes jumelles
(1) et qui vit avec la sienne
depuis ses dix-sept ans. Pour elle,
il s’agit d’un destin «
choisi par les
deux âmes pour leur évolution ».
De son côté, Céline Colle, également
auteure d’un livre sur le sujet
(2), a également «
cette conviction
que c’est écrit, que tout est décidé à
l’avance ».
Histoire à part, celle des flammes
jumelles serait, elle, le fruit d’un
contrat « d’âmoureux » célestes
dont le cœur se « leste ». Car le mal de l’autre préexiste à la rencontre
terrestre en cours et s’inscrit
dans un parcours ascensionnel.
Pour ceux qui y croient, pensez-vous ? Les flammes jumelles :
mythe ou réalité ? Mythe pour les
sceptiques, réalité pour ceux qui
en rêvent ou en sont la preuve
incarnée. Du
Banquet de Platon
aux couples légendaires Isis-Osiris,
Shiva-Shakti, Krishna-Parvati
en passant par les « jumeaux
cosmiques » appelés
Nommo des
Dogons du Mali, les flammes jumelles
sont dépeintes de manière
unanime comme une seule et
même âme scindée en deux entités
incarnées dans deux corps aux
polarités complémentaires. Deux
types se distinguent, d’après Céline
Colle : le
chaser – ou le poursuivant
– et le
runner – le fugitif
– qui n’auront alors de cesse que
de se retrouver pour se réunifier et
s’aimer d’un amour inconditionnel.
Redevenir un : leur état originel.
Vœu de l’éternel exaucé ou
péché mortel qu’elles vont payer ?
Amants éternels qui se cherchent
de vie en vie ou sempiternels aimants
qui se fuient ?
Si les flammes jumelles sont programmées
sur le grand échiquier
cosmique pour vivre un amour
karmique innommable et indestructible,
la souffrance fait partie
de l’expérience, inhérente à la
puissance du lien. Elle est même
indispensable, car « constructive ».
Si la rencontre réveille à l’amour
exceptionnel de cette relation
sacrée, elle ravive le mal qui en
chacune sommeille, rouvrant les
blessures existentielles. Parce que
l’histoire d’amour commence par
soi et que, sans transformation, la
réunion des deux sera pour une
autre vie. S’aimer d’abord semble
être la raison d’être de cet amour
dont on ne sort pas indemne. Le
mal de l’autre se mue en un autre
plus insidieux si on joue le « je ».
Profils complémentaires, que l’ego
peut mettre ventre à terre quand
peurs et blessures jouent un jeu
délétère, comme l’exprime Marie Sahuguede pour qui la relation
vient «
réveiller les blessures déjà
ancrées depuis l’enfance ». L’abandon
pour le
chaser, le rejet pour
le
runner. «
Chacun appuie sur ce
qui nous empêche d’être », complète
notre experte. S’ensuit alors
un combat entre Soi et Soi, « entre
la partie qui désire vivre cet amour
et être heureuse et l’autre qui a peur
d’être abandonnée : chaser
, rejetée :
runner
. Dans les deux cas, il s’agit
d’amour de Soi. […] On n’a pas
d’autre choix que celui de l’âme,
pas d’autre choix que de regarder la
blessure et de l’accueillir, pour la
transmuter. Elles ont peur d’être
elles-mêmes alors qu’il le faut », précise
Marie Sahuguede.
La transcendance pave le chemin
vers le bonheur, mais seul ou ensemble ? Tout ne serait qu’une histoire
d’osmose, de symbiose et de
fréquences vibratoires. Pour prétendre
à l’épanouissement sur tous
les plans, les flammes jumelles devront
franchir une à une les étapes
du parcours initiatique : la quête,
la rencontre, la fusion, la crise, la
séparation pour vivre – peut-être
dans cette vie – la réunion alchimique.
Si l’amour qui les unit est
exceptionnel, le mal ressenti est
proportionnel. «
La relation sera
forte, passionnée, tourmentée. Les
émotions seront exacerbées et les ego
ulcérés », explique Céline Colle.
En effet, avant de se retrouver,
elles ressentent déjà cette absence
inexpliquée, ce vide en elles que
seules la rencontre et leur « reconnexion » avec leur flamme jumelle
révélera et comblera… ou pas.
Car le sentiment de complétude
ne dure souvent que le temps de
la fusion en présence. Pour les
plus connectées, elle se prolonge
en conscience dans la 5D. «
Je
pense qu’on est dans ce parcours durant
toute la parenthèse terrestre : je
communique toujours avec lui dans
l’invisible. La vie se charge de me
faire un clin d’œil, même dans le
silence, il est là », nous confie Valérie
Motté, auteure de
Flammes
jumelles, une expérience d’amour
inconditionnel(3), concernant son
expérience.
De l’effervescence des sens
au mal de l’absence
Chaque rendez-vous est hors-sol,
mais vous plaque ensuite
au sol. Du Nirvana au trente-sixième
dessous il y a… l’absence
de l’autre. Le besoin irrépressible
de le revoir encore et encore et
toujours, jamais rassasié. «
Faire
l’amour avec sa flamme jumelle allume
tous les chakras, on ne connaît
ça ni avant ni après. […] On a
l’impression d’être rentré à la maison.
On vit un tel état de béatitude
dans l’instant présent que plus rien
d’autre ne compte. On ressent alors
un calme, une paix et un amour inconditionnel
jamais connus. Après,
tout est fade et sans saveur », nous
livre Valérie Motté. Puis le mal de
l’autre revient. Des années de mal-être
jusqu’à l’être exceptionnel qui
leur révèle le sens de leur vie tout
en le chamboulant, devenant leur
raison d’être… à tort ? Semblerait-il. «
On souffre parce qu’on ne
se regarde pas soi. L’autre n’est qu’un
miroir. Souvent on se demande :
“pourquoi est-ce que l’autre me fait
mal et me fait vivre ça ?” C’est une
réaction normale mais égotique. Si
je regarde ce qu’il me montre, je verrai
de quoi je souffre. Oui, ça fait
mal, mais […] l’humain évolue
parce qu’il souffre », explique Marie
Sahuguede, avant de poursuivre :
«
Cet amour merveilleux est aussi
fort que les blessures sont violentes.
[…] Au début, ce sont les blessures
qui dominent », d’où le sentiment
de souffrance insurmontable.
«
Après, l’amour prédomine. La
perfection n’existe pas. La souffrance
fait partie de l’aventure. Tout est
parfait quand on accepte les hauts et
les bas », assure l’auteure.
Quel que soit le stade de leur évolution
individuelle ou dans leur
couple, les flammes jumelles nous
confient que le but ultime est la reconnexion à sa propre nature et
que la souffrance n’est que celle de
l’ego. «
L’un amène à l’autre ce qui
lui manque, à cette unité intérieure
qui permet d’être soi avec l’autre »,
confirme Marie Sahuguede. Se
sentant prisonnière d’une dépendance
affective sans égal, chacune
des flammes se consume de son
mal : le
chaser poursuit son
runner
qui s’enfuit. En vain, on ne peut
changer ni accélérer le destin, tout
est écrit dans les lignes de leurs
mains. «
On ne peut pas éviter le
pire. Il ne faut pas. C’est justement
le pire qui nous invite à travailler
sur nous », explique Céline
Colle. «
On ne peut pas accélérer les
choses, mais on a tout à y gagner »,
conclut-elle.
Face aux absences et aux silences
de son
runner, le
chaser sombre
dans une nuit noire de l’âme, une
mort psychologique qui lui fend le
cœur et coupe le lien de sacrifice.
«
Il meurt ou il rebondit », explique
Céline Colle. Il apprend à s’aimer
d’abord pour ensuite mieux aimer
l’autre. Il se fait violence pour ne
pas jouer la carte de l’omniprésence.
Le
runner connaît lui aussi
la nuit noire de l’âme et ce n’est
qu’au prix de l’expression de ses
sentiments, indépendamment
du regard des autres et libéré des
loyautés parentales, qu’il pourra
revenir vers son
chaser. «
Croire
qu’on ne peut vivre sans l’autre est
une erreur. Si l’âme s’est incarnée
dans deux individus, ils peuvent
vivre une forme de complétude
seuls, ils n’ont pas besoin de l’autre »,
poursuit Céline. «
La flamme jumelle
allume un feu intérieur chez
l’autre. À lui d’apprendre à nourrir
ce feu, à s’aimer et à vivre seul. Il
faut arrêter de croire qu’on a besoin
de l’autre pour se réaliser et se sentir
complet. […] La souffrance disparaît
une fois qu’on a guéri ses blessures », conclut notre experte.
Si les deux sont faits pour s’aimer
et vivre une relation sacrée, ce ne
sera possible qu’au prix de leurs
blessures cicatrisées : réunifiés à
l’intérieur comme à l’extérieur.
Quand la souffrance donne le la et
le sens à un cœur sens dessus dessous,
elle finit par briller par son
absence, chacun ayant recouvré
son essence originelle.
Du mal existentiel à l’amour inconditionnel
Il s’agit d’exister sans sa flamme
jumelle pour mieux vivre avec
elle. Si le mal est inévitable parce
qu’il nous métamorphose, il vaut
mieux s’employer à l’apprivoiser
qu’à le dompter. Vivre avec pour
le transcender et réaliser que tout
ne serait qu’une histoire « de foi »,
selon Céline Colle. Mais aussi de
perception de la séparation. Nous
sommes faits de matières et de
vibrations. Si elles ne sont pas réunies
physiquement, les flammes
le sont dans le cœur et dans le
champ quantique. En s’aimant
d’un amour inconditionnel, chacune
aurait le pouvoir d’enrayer le
cercle vicieux de la croyance limitante
que, n’étant pas réunies, elles
sont séparées ; alors la souffrance
s’étiole, et dans les hautes sphères,
heureuses, elles convolent. Sur
Terre, leurs cœurs, comblés, de
leur propre nature convolent aussi.
Enfin, «
chacun avance à son
rythme. Quand on n’est plus dans
l’attente, on chemine vers tous ses
talents et sa potentialité de créer. Je
n’ai jamais autant créé que depuis
que je me suis reconnectée à cette
flamme créatrice qui brûle au fond
de moi », conclut Valérie Motté.
Et si le secret d’une relation épanouie
de flammes jumelles, réunies
ou pas, résidait dans les mots
de Valérie Motté : «
Au-delà de la vivre, on la vibre. »
À quoi ça sert l’amour ?
À quoi ça sert l’amour ?
On raconte toujours
Des histoires insensées
À quoi ça sert d’aimer ?
L’amour ne s’explique pas !
C’est une chose comme ça
Qui vient on ne sait d’où
Et vous prend tout à coup
Moi, j’ai entendu dire
Que l’amour fait souffrir
Que l’amour fait pleurer
À quoi ça sert d’aimer ?
L’amour ça sert à quoi ?
À nous donner d’la joie
Avec des larmes aux yeux ?
C’est triste et merveilleux !
Chantaient Édith Piaf et Théo Sarapo.
(1)
Les flammes
jumelles : vivre l’amour inconditionnel, Marie Sahuguede, éd. Le Lotus et l’éléphant, 2021.
(2)
Flammes jumelles : vivre une relation karmique initiatique, Céline Colle, éd. Jouvence éso, 2023.
(3)
Flammes jumelles, une expérience d’amour inconditionnel, Valérie Motté, éd. Exergue, 2022.