L’année 2022 aura connu une accélération et un accroissement sensibles des études sur les psychédéliques. Parfois, dans certains pays d’Europe, on a vu apparaître des congrès, des séminaires internationaux, et même des structures d’accueil légales d'un genre inédit (comme aux Pays-Bas), qui s’ajoutent à l’expérimentation médicale en institution. Simultanément, on peut observer dans la presse générale – en France, en Europe et dans le monde – une recrudescence quelque peu décomplexée (et elle aussi sans précédent) d’articles signalant et présentant ce renouveau enthousiaste des études scientifiques interdisciplinaires sur les psychédéliques. De plus, on commence à voir dans le milieu universitaire, ainsi que dans les médias grand public qui les relayent, ce que l’on pourrait interpréter comme un début de levée des tabous sur ces sujets, et l’émergence d’un nouvel âge d’or des études, de la compréhension et même de l’innovation dans ce domaine très particulier.

Les recherches et les expérimentations rigoureuses, en même temps qu'une utilisation sauvage non réglementée, ont connu un essor dans les années 1950-1970, avant de faire l’objet d’une interdiction mondiale massive et radicale à partir des années 1970. Assiste-t-on véritablement au début d’un virage décisif dans nos sociétés modernes, qui verra à terme l’intégration intelligente et encadrée par l’approche scientifique des plus puissants moyens connus pour induire des états de conscience élargis et non ordinaires – une puissance en partie à l’origine de leur bannissement et de leur interdiction ?

Définition et actions

Les psychédéliques sont une catégorie particulière de substances psychoactives faisant partie du « patrimoine pharmacologique » et des usages culturels, souvent rituels, des sociétés humaines. Ces substances sont présentes dans certaines plantes connues depuis des milliers d’années, et d’autres sont synthétisées (le LSD ou la MDMA, par exemple) par l’homme depuis un siècle environ. L’une de leurs spécificités essentielles est un ensemble de modifications très profondes de tous les registres de la perception du temps, de l’espace, de la mémoire, de l’imaginaire, de l’affectivité, de la sensibilité corporelle et de l’identité. Dans des cadres protégés et rituels, ces substances ouvrent souvent sur un flux d’« eurêka existentiels » et d’émerveillements libérateurs ainsi que sur une forme d’ivresse lucide spéciale qui unit la conscience de soi et le sentiment d’être relié à une dimension transpersonnelle, cosmique, océanique, sacrée, mystérieuse, fabuleuse – raison pour laquelle elles sont aussi qualifiées d’enthéogènes, c’est-à-dire qu'elles induisent un état d’« inspiration spirituelle ». Le terme « psychédélique », quant à lui, renvoie étymologiquement à une dimension de révélation de « l’âme », du psychisme, à la manifestation visible de l’inconscient au sens large du terme (par le biais d’une ouverture se produisant grâce à des moyens pharmacologiques particuliers). Ce terme désigne à la fois les substances et leurs effets. De ce point de vue, il existe de nombreuses autres pratiques spirituelles aux modalités psychophysiologiques variées (jeûne, contemplation, prière…) qui sont « psychédéliques » dans le sens où elles vont être porteuses d’une ouverture similaire. Notons enfin que le terme psychédélique est souvent associé par simplification à un aspect correspondant à une phase initiale de l’expérience psychédélique/enthéogénique : la dimension à la fois esthétique et symbolique, voire hallucinatoire, synesthétique, kaléidoscopique et colorée. Cette dernière est presque une sorte d’archétype – une structure universelle de l’imaginaire des franchissements de seuil, l’antichambre de la transe et l’ouverture sur des strates plus profondes du psychisme humain et transpersonnel. Paradoxalement, dans l'immense diversité des produits psychoactifs, ces substances sont celles qui présentent le potentiel d’abus le plus faible et un risque d’addiction quasi nul.

Les dernières avancées dans le domaine

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