Joyau de la sagesse spirituelle indienne au rayonnement mondial,
la Bhagavad Gîtâ nous enseigne l’art d’agir dans la vie : le karma yoga.
Le plus grand texte sur le sens de l’action juste révèle la voie qui dissout la souffrance.
Savoirs ancestraux
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Poème spirituel et philosophique composé vraisemblablement au IIe (ou IIIe) siècle avant notre ère, la Bhagavad Gîtâ, littéralement le « Chant du Bienheureux », est un épisode au cœur de l’immense épopée du Mahâbhârata (« Grande Geste des Bhârata »), monument de la littérature indienne. Cette œuvre profonde et universelle de 700 strophes rassemblées en 18 chants prend la forme d’un dialogue entre le guerrier Arjuna et son cocher Krishna, avatar de Vishnu, dieu de la recomposition cyclique des mondes.
Sur le char arrêté au milieu du champ de bataille d’une guerre fratricide, le vaillant archer Arjuna fait face à un dilemme moral insoluble : doit-il combattre ceux des siens qui se trouvent dans le rang des ennemis ? « L’échange de questions et réponses sur les mystères ultimes s’engage loin des bosquets paisibles, favorables à la contemplation ; nous sommes dans la nuit qui précède la bataille décisive entre les Pandava [menés par Arjuna, NDLR] et leurs cousins, les cent Kaurava [...], dans ce “champ de justice” où l’ordre cosmique est destiné à se réaffirmer », commente l’indianiste Silvia d’Intino dans sa traduction d’après le manuscrit original Bhagavadgîtâ. Krishna, appelé aussi Bhagavan (le « Bienheureux ») va instruire son ami sur l’insondable voie de l’action pour la sauvegarde du dharma en péril, du bon ordre des choses. Pour Sri Aurobindo, la particularité de la Gîtâ est de ne pas être une œuvre isolée, le fruit de la vie spirituelle d’une personnalité créatrice telle que le Christ, Mahomet ou Bouddha, ou le résultat d’une époque de pure recherche spirituelle comme le sont les Védas ou les Upanishads. « C’est un épisode de l’histoire épique des nations et de leurs guerres, a-t-il écrit, des hommes et de leurs faits d’armes, son enseignement est donné à l’occasion de la crise que traverse l’âme d’un de ses personnages principaux. »
La voie de l’agir
Dans la Bhagavad Gîtâ, à travers le mot yoga (unir, relier) qu’elle a popularisé dans la culture indienne, trois voies sont dessinées : la voie de la connaissance (jnana yoga), la voie de l’agir (karma yoga) et la voie de la dévotion (bhakti yoga). « En la traduisant moi-même et en lisant les commentaires de ses premiers traducteurs, les deux grands philosophes indiens Adi Shankara et Ramanuja, l’agir est selon moi la voie principale dégagée par la Gîtâ », expose le professeur de philosophie et spécialiste des philosophes de l’Inde ancienne Marc Ballanfat, auteur de La Bhagavadgîtâ. La guerre dont il est question ici est une métaphore des confusions, des doutes et des peurs que vit l’être humain. Il ne s’agit pas d’une souffrance physique, mais bien d’une souffrance morale, psychologique.
« Quand je vois les membres de ma famille désireux de combattre et rangés en bataille, mes membres s’affaiblissent et ma bouche se dessèche, mon corps tremble et mes cheveux se dressent, mon arc s’échappe de ma main, ma peau brûle, je ne peux pas me tenir debout et ma pensée tourbillonne. » C’est ainsi qu’Arjuna décrit son état. Mais voici la réponse que Krishna va lui donner, en substance, résumée par Marc Ballanfat : « Tu es un guerrier, et en tant que guerrier, ton devoir, c’est d’agir. Il ne faut jamais renoncer à agir, car le monde repose sur les actions des hommes. » Comme Arjuna qui ne peut pas laisser l’injustice s’installer, nous sommes faits pour agir dans le théâtre du monde. « Il faut accomplir ce qui est à accomplir, car dans ce cas agir est meilleur que ne pas agir. Sans action, le monde, la vie ne pourraient continuer » (III 2-9), relève l’indianiste et sanskritiste Colette Poggi. « Agir pour qu’il y ait plus d’harmonie dans le monde et non pour nuire. » (...)
Angélique Garcia est journaliste depuis une dizaine d'années. Elle a été rédactrice en chef d’un média indépendant en région Occitanie consacré essentiellement aux thèmes de la culture, de l’art, du patrimoine et de l’écologie. Sa collaboration avec l’INREES / Inexploré lui permet de continuer à approfondir des sujets qui l’inspirent depuis longtemps (la conscience, la spiritualité…). En parallèle, elle se consacre à l’écriture.
Elle pratique la danse ainsi que le yoga auquel elle se forme en v ...
À
retrouver
dans
Inexploré n°61
Karma
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