Nao mesure 58 centimètres et regarde Lucas, 5 ans, de ses yeux ronds. Lucas est autiste, il souffre de graves difficultés de communication. Nao, lui, est un robot tout mignon qui parle, bouge, danse... D’abord intimidé, Lucas finit par oser l’approcher. Quelques jours plus tard, il interagit avec lui comme il ne l’avait jamais fait avec personne.

Nao n’est pas un simple jouet : c’est un outil éducatif, doté de programmes spécialement étudiés pour favoriser l’ouverture des enfants autistes. L’histoire commence en 2006 lorsque Bruno Maisonnier, fondateur d’Aldebaran Robotics, conçoit un robot humanoïde dans l’idée d’en faire « l’interface ultime » avec laquelle interagir par la seule parole, sans écran ni clavier. S’apercevant de l’attrait exercé par cette technologie sur les enfants autistes, chercheurs, développeurs, enseignants et parents s’associent pour imaginer des solutions.

« Ni humain, ni objet inanimé, Nao sert de pont entre ces enfants et le monde », explique Olivier Joubert, docteur en neuropsychologie et responsable du programme ASK Nao (Autism Solution for Kids) au sein d’Aldebaran. Son apparence, d’abord, le rend différent d’un simple outil informatique. On lui donne un nom, on se prend d’affection pour lui... « Sa forme humanoïde permet de faire travailler les enfants sur des compétences sociales, mais il reste une technologie, donc prédictible, précise Olivier Joubert. Une donnée essentielle pour les autistes, terrifiés par les interactions et les changements imprévus. »
Le visage de Nao reste simple, ce qui évite à l’enfant d’être bombardé par les stimuli qui sont normalement le lot des échanges humains : expressions faciales, ton de la voix, langage du corps et du regard...

Les applications développées dans le cadre du programme ASK Nao ciblent différents objectifs, tels que l’imitation, la reconnaissance d’émotions, la labellisation d’objets ou l’apprentissage de nouveaux mots. « Toutes sont paramétrables, afin de s’adapter aux besoins spécifiques », souligne Olivier Joubert.
En se connectant à une interface en ligne, l’enseignant peut par exemple, sur un exercice de reconnaissance d’émotions, choisir un niveau « facile » et ne travailler d’abord que sur la joie, la colère et la surprise. « Après, il clique sur Play » et Nao déroule le programme, avec patience et neutralité – car là où un adulte peut s’épuiser à accompagner et répéter encore et encore, la technologie est d’une infatigable constance. Face au robot, l’enfant peut essayer, se tromper, tenter des choses jusqu’à y arriver, sans peur d’être jugé. (...)