Jean-Jacques Boucharlat, Gabriel et Laura, une famille de guérisseurs
Chez les Boucharlat, le magnétisme est une histoire de famille. À l’accueil du cabinet trônent les portraits de quatre générations de guérisseurs : Jean-Jacques, installé ici, à Clermont-Ferrand, depuis vingt-huit ans. Joseph, feu le grand-père, « le protecteur, le guide », dont on ressent encore la présence dans tout le cabinet, et Marie-Louise, l’arrière-grand-mère, maraîchère de son état qui, durant toute sa vie, a soigné les chalands sur les marchés. Fraîchement suspendue aux côtés de celle de ses aïeux, la bobine du jeune Gabriel, 21 ans, le fiston, « la relève ». Lui aussi possède le « don ». «
À 5 ans, mon père m’a fait soigner l’eczéma de ma grand-mère pour voir si j’avais moi aussi hérité du magnétisme », se souvient Gabriel. «
Et à 6 ans, il momifiait son premier poisson ! », ajoute fièrement Jean-Jacques en désignant la bête desséchée par les mains de son fils, minutieusement conservée dans une petite vitrine. À l’école primaire, le jeune Boucharlat soulageait déjà les problèmes de dents de ses camarades de classe et « arrêtait le sang » quand l’un d’eux s’écorchait dans la cour de récré. Au collège, ce sont ses professeurs qui bénéficiaient gracieusement des facultés hors du commun de l’adolescent, pour une migraine, une rage de dents. «
J’ai toujours eu cette envie, ce besoin d’aider les autres, confie-t-il,
et j’ai très vite su quel métier je souhaiterais exercer plus tard. »
Il faut dire que dès l’âge de 11 ans, Gabriel assistait son magnétiseur de père durant les séances. «
Je regardais comment il procédait, et parfois, il me confiait des pathologies faciles à traiter comme le psoriasis ou l’eczéma », raconte-t-il. Pour compléter le tableau de famille, la filleule de Jean-Jacques Boucharlat, Laura, 22 ans, possède elle aussi le don et s’entraînait, petite, sur les animaux. «
Il suffisait que je pose les mains sur eux pour qu’ils s’endorment », raconte-t-elle. Aujourd’hui, Gabriel et sa «
sœur de cœur », tous deux étudiants en naturopathie et en reboutement, – «
pour bien connaître le corps humain » –, font leurs classes au cabinet en récupérant les clients que le maître de céans, faute de temps, ne peut caser dans son agenda de ministre. Car Jean-Jacques Boucharlat est un guérisseur très demandé qui, en plus de recevoir à son cabinet une quinzaine de clients par jour, collabore avec le CHU de Clermont-Ferrand et deux cliniques de la ville.
Accrochés au mur de l’entrée comme d’innombrables trophées, des minerves, des cannes, des semelles compensées, des corsets, des béquilles et autres prothèses usagées dont les patients se sont débarrassés après une ou plusieurs séances de magnétisme, accompagnés d’une flopée de lettres de remerciement décolorées par le temps, témoignant des bienfaits de l’intervention de Jean-Jacques Boucharlat sur leurs douleurs. «
Le magnétisme peut permettre de consolider les os et d’aider à la cicatrisation. Mais comme je le dis souvent à mes clients, il ne faut pas s’attendre à des miracles, je ne suis pas le Bon Dieu ! », lance-t-il, l’œil qui frise. Son savoir-faire, mais aussi sa gouaille, sa fantaisie et sa jovialité légendaires ont fait sa popularité. «
Le rire et l’humour font partie de la consultation, précise-t-il.
Les barrières tombent, la personne sera plus détendue et la séance de magnétisme n’en sera que plus efficace. » S’il avoue ne pas être féru d’exercices physiques, le joyeux drille, fan de bonne chère – « végétarienne » – et de Johnny Hallyday – son «
idole de toujours » dont la photo orne son bureau – aime mettre ses compétences au service des sportifs. Revitaliser leurs corps fatigués et soulager les bobos en tout genre : tendinites, entorses musculaires, hernies, lumbagos... Une kyrielle de maillots colorés, de fanions et de photos dédicacées du Clermont foot et de l’équipe auvergnate de VTT qu’il a suivie en coupe et championnat de France garnissent les murs de la salle d’attente. Et toujours, une multitude de lettres de reconnaissance. Dans trois ans, Jean-Jacques Boucharlat laissera sa «
petite entreprise qui ne connaît pas la crise » à son fils pour se retirer dans le Lot-et-Garonne où il a déjà ouvert un second cabinet.
À 6 ans, il momifiait son premier poisson !
Jean-Luc Bartoli, le magnétiseur judoka
«
Je fonctionne comme un animal », aime-t-il dire pour se définir. Avec l’expérience, mais aussi «
la méditation, la marche et une relation très forte avec les éléments de la nature », Jean-Luc Bartoli sent, perçoit comme il respire le monde qui l’entoure et ses congénères. Avec une acuité sensorielle hors du commun, il capte, en un clin d’œil, les énergies des corps et leurs dysfonctionnements. C’est ainsi qu’à 51 ans, il s’est forgé une réputation hors pair. «
Le magnétiseur ne doit pas accepter de recevoir le mérite des guérisons, car l’énergie qu’il transmet ne lui appartient pas. Il tient un rôle de relais entre une énergie extérieure, universelle, à laquelle il se connecte et le patient. Je n’ai pas de pouvoir surnaturel. Simplement une possibilité de soulager les gens. »
Bâti comme une armoire à glace, charismatique, rayonnant, généreux, rassurant, «
à la fois instinctif et bien ancré dans la réalité grâce au judo » qu’il pratique depuis l’âge de 6 ans, Jean-Luc Bartoli est «
un pur ». C’est ainsi qu’il se plaît à résumer en un mot les qualités essentielles du guérisseur. Ses patients, il les tutoie, «
du SDF au ministre, une façon d’établir un lien d’intimité qui place le magnétiseur et celui qui vient demander de l’aide dans une relation amicale », explique-t-il. À peine la personne a-t-elle passé la porte de son cabinet, sobre comme celui d’un médecin généraliste, qu’il a déjà perçu des informations sur son état global, «
la partie immergée de l’être humain. Certains guérisseurs disent bénéficier de l’aide de saints ou de guides. Pour ma part, je me connecte au cosmos, les deux pieds bien enracinés dans le sol. » Avant que le patient ne s’allonge sur la table de soins, il continue de vérifier, concentré, «
dans un état total de lâcher-prise », les données qu’il reçoit «
par vibrations », en tournant autour de la personne, comme «
pour la palper énergétiquement ». Et de sentir, dans ses mains, dans ses tripes parfois, «
les éventuels déséquilibres énergétiques afin de définir les zones sur lesquelles travailler ».
Dès qu’il impose ses mains, il ressent les changements de rythmes, cardiaque et respiratoire, puis discerne, progressivement, une meilleure circulation du « courant énergétique ». Les enfants l’appellent le magicien, les parents aussi, parfois. «
Je ne fais pourtant ni magie ni miracle ! On n’est pas à Lourdes, ici, on est à Saint-Brieuc ! Et puis, il ne faut pas perdre de vue que j’ai mes limites et je ne guéris pas tout ! » Comme la plupart des magnétiseurs, Jean-Luc Bartoli a découvert ce don « par hasard ». Gamin de la campagne en Seine-et-Marne, il rêve de devenir pompier, dont il admire «
non pas l’uniforme, mais le dévouement ». À 9 ans, dans la cour de récré, un camarade s’évanouit. Sans expliquer son geste, il se penche sur l’enfant et pose ses mains sur sa poitrine. Le camarade reprend immédiatement conscience. Bien que surpris, il n’y prête guère attention, persuadé que tout le monde est capable d’en faire autant.
À 16 ans, il obtient sa ceinture noire de judo. Lors d’un entraînement, un copain fait une chute et se déboîte le bras. Sans savoir comment, le jeune Bartoli le remet en place. Aux urgences, le chirurgien orthopédiste qui examine le judoka blessé s’exclame : «
Je ne sais pas qui vous a remis le bras, mais le collègue a fait du beau travail. On n’aura pas besoin de vous opérer. » Une première expérience de reboutement. À 20 ans, il devient gestionnaire des équipements de Mirage II à l’usine Dassault, et membre de l’équipe de sécurité et d’intervention en piste et premiers secours. Pompier de l’air, son rêve d’enfant. Parallèlement, il suit des cours à l’école des cadres, à l’Institut national du sport et de l’éducation physique. Une première approche de la connaissance du corps humain avant de passer son diplôme de secouriste du travail chez Dassault. Quelques années plus tard, en 1991, il crée avec sa femme Anne-Marie, infirmière originaire de Bretagne, le centre Form O Tonic à Saint-Brieuc. «
L’activité physique est essentielle pour la santé. Le sport devrait être remboursé par la Sécurité sociale à la place de certains médicaments ! », martèle-t-il.
Dans cet établissement, de plus en plus de clients se confient à lui. Jean-Luc Bartoli remet les corps en place, écoute les troubles de l’âme et impose ses mains pour calmer les douleurs. Le bouche-à-oreille lui amène un nouveau type de clientèle. Il prend conscience qu’il a cette aptitude innée à soulager les maux. Après une formation en naturopathie, il s’installe en tant que magnétiseur à plein temps. Une voisine qui pratique l’écriture automatique avec son fils défunt conforte ce choix. Elle lui parle de sa vie, avec des détails que personne ne pouvait connaître. Elle lui prédit aussi que ses perceptions s’affûteront avec les années et que des gens du monde entier viendront le voir pour lui demander de l’aide. Son destin était-il déjà tracé ? «
Une chose est sûre, je remercie chaque jour le ciel – sans savoir qui précisément – pour cette chose merveilleuse qui m’est accordée : pouvoir aider mon prochain. Participer à la guérison d’une maladie qu’on disait difficile à soigner me remplit de joie. »
Le sport devrait être remboursé par la Sécurité sociale à la place de certains médicaments !
Élisabeth Messina, magnétiseuse et acupunctrice
Magnétiseuse, acupunctrice et peintre talentueuse, Élisabeth Messina a de l’énergie à revendre et «
de la suite dans les idées. Pour que soient enfin reconnues les médecines douces », la guérisseuse provençale au regard félin décide, il y a trois ans, de fonder l’association Apsamed* qui a pour ambition de faire travailler ensemble tous les intervenants de santé, notamment médecins et guérisseurs (voir encadré). «
La collaboration de toutes ces médecines, c’est l’avenir ! », assure-t-elle, enthousiaste. Plusieurs thérapeutes bénévoles, membres de l’association, proposent déjà leurs services dans trois hôpitaux à Marseille et Allauch. Et bientôt, un cabinet itinérant, aménagé dans un bus offert par les marins-pompiers de Marseille, sillonnera la région pour dispenser des soins gratuits en médecine douce. Cette fibre entrepreneuriale, Élisabeth l’a acquise très jeune alors qu’elle travaillait comme chef de produit pour un laboratoire pharmaceutique. Le destin de la
businesswoman basculera le jour où elle décidera d’aller consulter un magnétiseur pour un problème de fatigue chronique. «
Avec une grand-mère rebouteuse, j’étais déjà un peu ouverte sur les médecines douces. » Le praticien ressent qu’elle possède, elle aussi, ce don. La jeune femme, alors âgée de 27 ans, commence à «
jouer avec ses mains. Avant d’en faire mon métier, je me suis amusée, pendant plusieurs années, à soulager ma famille et mes amis. »
Si, entre temps, elle crée avec son mari une entreprise de produits pour blocs opératoires dentaires qui tourne encore aujourd’hui à plein régime, Élisabeth Messina éprouve «
petit à petit le besoin irrépressible de [se] consacrer au bien-être d’autrui. J’ai toujours été très sensible à la douleur des autres, mais progressivement, je me suis mise à percevoir les pathologies des gens. Je savais où se situaient leurs maux, comme sur une radiographie, avant même qu’ils ouvrent la bouche. J’ai compris quelle était la voie à suivre. » Sur son chemin, deux guérisseurs renommés, Jacques Montagner, aujourd’hui décédé, et Jean-Luc Bartoli lui enseigneront les ficelles du métier. En 1995, elle ouvre son cabinet. Quatre ans plus tard, parce qu’elle se «
passionne pour la médecine traditionnelle chinoise et souhaite mieux connaître le corps humain », Élisabeth Messina se forme à l’acupuncture. «
Si je voulais instaurer un dialogue avec les médecins, je trouvais important d’acquérir une assise théorique et des bases anatomiques. » Aujourd’hui, à 49 ans, Élisabeth Messina rêve d’ouvrir, au pays de Pagnol, un centre où cohabiteraient médecines douces et médecine conventionnelle. «
Les mentalités sont en train de changer. Les médecins s’ouvrent. Je veux croire que ce sera un jour possible en France ! »
Bernard Devingt, le magnétiseur parisien
Il incarne la force tranquille. Solide comme un chêne. Droit. Zen. Les pieds sur terre, bien enracinés. Pour ne jamais se perdre. Ni se fourvoyer. «
Quand on est magnétiseur, il est, je pense, essentiel d’être ancré, stable. De réaliser un travail sur soi, de savoir se remettre en question. Et de se défaire de l’ego. Pour contribuer au bien-être des autres sans y rechercher d’intérêt personnel, sans quête de pouvoir ni d’emprise sur autrui. Ceux qui se laissent voir comme des gourous, qui prennent la grosse tête ou qui n’y voient qu’un business se trompent de voie. »
Bernard Devingt est guérisseur depuis vingt ans. Pas à plein temps. Il est aussi régisseur d’une cour pavée pittoresque au cœur d’un quartier populaire de Paris. Un passage privé verdoyant constitué d’ateliers d’artistes, de galeries d’art et de bureaux d’architectes. Un havre de paix qui contraste avec le tumulte de la capitale. «
Comme je ne vis pas exclusivement des séances, je peux me permettre d’aider gratuitement certaines personnes en souffrance qui n’ont pas toujours les moyens de payer. » Ses patients, il les reçoit chez lui. Un matelas au sol, dans une petite pièce tamisée. Zen, comme lui. Aux murs et sur une étagère, une cartographie des chakras, un attrape-rêves, des pierres, des cristaux, quelques statuettes de caciques amérindiens – «
cadeaux de mes clients » –, et une flopée de livres sur le magnétisme, les énergies, les médecines douces ou encore l’histoire des Indiens d’Amérique du Nord. Une culture qui lui «
parle » parce qu’elle «
porte de vraies valeurs, basées sur le respect de la terre et du vivant ».
Il y a vingt ans, l’univers du magnétisme lui était «
totalement étranger ». Mais une révélation a un jour fait basculer sa vie. Bernard Devingt, alors âgé de 32 ans, chapeautait les équipes d’une entreprise de sécurité pour des boîtes de nuit ou la Française des jeux... Un employé qu’il avait pris sous son aile «
parce qu’il avait des difficultés familiales » décide d’aller consulter une médium. Cette femme parle de lui et demande à le rencontrer. La conversation est enregistrée sur cassette. Bernard Devingt l’écoutera, abasourdi. Il ira lui rendre visite «
par curiosité. Elle m’a donné de nombreux détails sur mon passé que personne ne pouvait connaître. J’étais stupéfait. Puis elle m’a affirmé que j’avais un don que je devais développer. » Cette déclaration fera écho en lui. Bernard Devingt se familiarise d’abord avec la radiesthésie – détection de sources d’eau souterraines, réharmonisation des lieux d’habitation... – avant de faire la connaissance d’un magnétiseur qui lui «
mettra le pied à l’étrier. Le début d’un cheminement », dit-il. Aujourd’hui, le magnétiseur parisien, la cinquantaine heureuse, se plaît, depuis vingt ans, à «
faire du bien aux gens qui souffrent, en ville plus qu’ailleurs, de nombreux problèmes liés au stress. Je ne dirais pas que c’est une mission, je n’ai pas cette prétention, mais je sais, en tout cas, que c’est ce que je dois faire. »
* Association de prévention pour la santé par les médecines douces.