En tant qu’être humains en chemin, nous sommes
en quête de sens, de compréhension et d’orientation.
Ce sens peut être mis en lumière et en
perspective par des informations ou des perceptions
provenant d’autres dimensions que la réalité
ordinaire. Nous sommes tous des perceptifs, tous
capables de nous connecter à d’autres plans. Il
nous semble d’ailleurs naturel d’avoir des rêves
inspirés ou des insights qui viennent éclairer, à
certains moments clés, des aiguillages sur nos
voies de vie. «
Les perceptions sont une propriété
même de la conscience. Tout être humain a cette
capacité, car il participe d’une métaconscience »,
souligne Alexis Tournier, praticien de la voyance
et des arts divinatoires.
Du réveil à la révélation
Le canal perceptif est donc accessible et fonctionnel
chez tout un chacun, plus ou moins consciemment.
Continue, la communication entre les plans,
qu’il s’agisse d’entrer en contact avec l’au-delà ou
encore de percevoir le futur, doit être apprivoisée
(familiarisation avec les états élargis de conscience,
initiation et entraînement à la médiumnité et l’intuition...),
car elle est peu développée dans notre
culture matérialiste. Cette perception subtile
demande un double mouvement, paradoxal : d’ouverture
à l’inconnu, de lâcher-prise et d’ancrage,
de maîtrise, à différencier du contrôle. Car les perceptions
extralucides peuvent être brouillées par le
chant des sirènes de l’ego, soucieux de ce fameux
contrôle et aveuglé par les conditionnements, passant
de fait souvent à côté de la boussole de l’intuition,
voire des révélations des voyants ou des
médiums. A contrario, l’individu peut aussi se laisser
berner. «
On recherche le contact avec le monde
des esprits, on ouvre la porte, mais sur qui ? On est en
contact, mais avec quoi ? Je suis passé par ces différents
types de communication avec le monde invisible et je
sais, avec le recul, qu’il faut être extrêmement vigilant.
Nos amis spirites, ainsi que les bouddhistes, attirent
notre attention sur le fait que nous pouvons être abusés
par les esprits », témoigne Jean-Marie Le Gall,
magnétiseur, qui a décidé d’arrêter la médiumnité
après 34 ans de pratique.
Ce qu’on appelle « le futur »
serait, en réalité, une coexistence
de plusieurs futurs.
Dans notre société cartésienne,
cette faculté perceptive originelle est la plupart
du temps endormie par le processus éducatif,
l’environnement social et culturel.
«
Si certains sont
familiers avec ces perceptions depuis l’enfance, ce don se révèle et se réveille souvent suite à des traumatismes
ou chocs émotionnels qui nous plongent dans des états
différents, nous ouvrant à des intuitions ou des perceptions
fulgurantes... sauf qu’en fait on retrouve sa
vraie nature, connectée », précise Alexis Tournier.
Sur cette voie de l’éveil à même de transcender
nos destinées, les grandes philosophies orientales
ou encore le chamanisme amènent l’individu à
développer la conscience de « qui » il est, avec, en
corollaire, le développement de ces capacités perceptives,
médiumniques, qui ouvrent à l’au-delà de
soi. «
Le langage de l’âme utilise plutôt une vibration
universelle, celle de la lumière, de l’amour et de la
pensée pure. Pour pouvoir s’exprimer, cette vibration
passe par le ressenti du corps physique ou des autres
corps subtils », précise Sylvie Ouellet, auteure entre
autres de
J’aimerais tant te parler… (éd. Dauphin
Blanc, 2007). Cette écoute médiumnique passe
donc par un éprouvé vibratoire, dont on peut ressentir
intimement la justesse.
Connexion illimitée
Désireux de mieux comprendre les perceptions
extrasensorielles qui l’accompagnent depuis
l’adolescence, Alexis Tournier a participé à des
expérimentations avec des universitaires au sein
de l’Institut métapsychique international (IMI)
et a notamment créé Clevao, qui propose des
formations à l’intuition et aux arts divinatoires.
Attentif à faire le pont entre le monde scientifique
dans lequel il a baigné (bac C, prépa de maths,
école d’ingénieurs, avant de bifurquer vers la
voyance) et le perceptif qu’il est, il nous relaie le
consensus émergent qui rapproche sagesses traditionnelles
et sciences actuelles : «
Tout est information.
Tout ce qui est, tout ce qui a été, tout ce qui
va être appartient à une matrice de conscience non
locale. Notre monde physique n’est qu’une projection
holographique de cette matrice », explique-t-il. Les
capacités de voyance, de médiumnité ou encore
de perception intuitive ont un dénominateur commun : elles donnent accès à
cette matrice d’information non locale.
«
La voyance et la médiumnité sont très similaires, c’est
juste une question de vocabulaire. Lorsqu’on évoque
des guides, des anges, des esprits, on vient plaquer sur
cette conscience non locale des dénominations accessibles
à notre mental, pour se rassurer. Or, c’est peutêtre
beaucoup plus transcendantal que ça, débordant
notre système de représentation », interpelle-t-il. Et
de nous imaginer, être humains, comme des poissons
rouges, occupés à deviser sur ce qu’il y a de
l’autre côté du « bocal »... Il poursuit la métaphore
: «
De temps en temps, une “épuisette” pêche
un poisson ; de retour dans le bocal, il va raconter ce
qu’il a vu de l’autre côté. »
Errare humanum est
Cette information non locale parvient à un individu
perceptif : médium, voyant, mais cela peut
aussi être tout un chacun, comme nous l’avons
vu. Celui-ci la conscientise et l’exprime.
Dès lors, les erreurs ou imprécisions peuvent venir
d’un mauvais décodage de la personne qui reçoit
l’information. «
Lors de la transcription en mots
des perceptions, l’information est passée au tamis
des interprétations, des filtres émotionnels et autres
projections de l’individu. Prenez deux personnes
qui ont vécu le même événement ; en écoutant leurs
récits, on peut parfois croire à deux histoires différentes.
Même un très bon médium, un très bon
voyant peut se fourvoyer. Nous ne sommes pas des
machines ! » Sur un plan plus subtil, la conscience
non locale est par nature très vivante et dynamique.
En écho à la physique quantique, Alexis
Tournier souligne qu’en percevant une information
sur le futur, on agit sur ce dernier. «
Il peut
se réagencer. De manière subtile, voire inconsciente,
le futur se met à jour. Perception et action sont les
deux faces d’une même pièce. » Ce qu’on appelle
« le futur » serait, en réalité, une coexistence de
plusieurs futurs. Voyants et perceptifs, quand
nous percevons le futur, lequel voyons-nous ?
«
Vraisemblablement le plus probable ; celui qui
a le plus de chances de se manifester. La perception
de ce futur peut (le) changer ; il peut “sauter” à un
autre futur potentiel. » Alexis Tournier utilise la
métaphore d’une corde constituée de cordelettes
plus petites, pas encore tressées, dont les drains
partent dans tous les sens, symbolisant autant
de futurs possibles. «
Le mouvement du présent,
comme le ferait une fermeture éclair, permet d’assembler
ces cordelettes non tressées : il y a actualisation
du futur. »
Faux contact ?
Médiums et voyants s’accordent quant aux frustrations de ceux
qui les consultent lorsque la réponse ou le contact établi
ne correspondent pas à leurs attentes et, pire, si rien ne se produit !
« Le mental humain est très puissant. Il nous empêche souvent d’ouvrir notre
esprit à de nouvelles orientations, d’écouter et d’entendre les messages de
l’au-delà, ou tout simplement de prendre le contrôle de notre existence »,
avertit la médium Jade Devaux. Il arrive aussi que ce qui semble être une
erreur de « casting » se révèle l’opportunité d’un contact inattendu. « Je me
souviens d’une femme qui souhaitait entrer en contact avec son enfant décédé.
Or c’est son mari, qu’elle n’avait aucune envie de contacter, qui s’est
présenté... mais parce qu’il avait quelque chose d’important à lui dire », confie
la médium Florence Hubert. Ce témoignage, comme tant d’autres, laisse penser
que ce qui apparaît comme une erreur survient pour révéler des choses en
nous, comme si l’Univers nous poussait vers notre destinée... Et le voyant ou le
médium, en quelque sorte candide de ces enjeux cachés, en suivant le guide
qui l’accompagne, nous pousse dans cette direction fondamentalement juste
pour nous... même si cela reste une erreur aux yeux du public.
Au sommaire de nos vies
Tout ceci nous ouvre à une autre question abyssale
: le livre de nos vies est-il écrit, tel un manuscrit
fini... ou pas ? Il s’agit là d’un vrai débat philosophique
depuis l’Antiquité. Voyance, médiumnité
et arts divinatoires ont toujours existé pour lire
entre les lignes et tenter de découvrir les chapitres
à venir. «
Nous sommes comme des fusibles dans la
société », reconnaît Alexis Tournier. Son expérience
de la voyance lui laisse à penser que l’avenir n’est
pas écrit à 100 %. Il y a une sorte d’indétermination,
relayée par la physique quantique. «
Un
chemin de vie est une sorte de cap d’ordre général.
Comme en randonnée, plusieurs sentiers permettent
de rejoindre cette direction ; à l’image du Mont-Blanc
pouvant être atteint par différentes voies. » C’est là
qu’intervient le libre arbitre : à chacun d’emprunter
le sentier qu’il veut. En fonction de nos conditionnements,
d’ordre social, historique, culturel,
transgénérationnel, nous opterons pour tel ou
tel itinéraire, mais nous pourrons peut-être faire
le choix de sortir des voies balisées, des sentiers
battus...
«
Les médiums, les voyants, sont comme des
drones ; ils ont une vision très large. Avec ce recul, ils
peuvent voir les panneaux indicateurs, les directions,
les distances entre deux bornes ou encore les croisements
sur le chemin de vie. Mais la personne a toujours
le choix. » Pour la médium Florence Hubert, à
nous de saisir ou pas la perche que nous tendent le
message révélé, les perceptions dévoilées, avouant
qu’il est parfois plus simple de rester dans l’(in)
confort du connu... Il arrive aussi que le voyant ou
le médium ne parvienne pas à percevoir ou entrer
en contact avec cette métaconscience. L’opacité est
susceptible de provenir, plus ou moins consciemment,
de la personne qui consulte, mue par un
désir contradictoire : elle a pris rendez-vous, mais
elle ne veut pas vraiment savoir... Cette absence
de contact ou de perceptions est parfois du fait du
médium ou du voyant. Comme pour un sportif, il
arrive qu’il y ait trop de fatigue ou que cela soit un
jour sans. Peut enfin survenir, chez le perceptif, une
forme d’autocensure, consciente ou non. Comme
si ce qu’il y avait à révéler était « trop dangereux »
pour la personne, qu’elle n’était pas prête ou que
cela entraverait trop son libre arbitre. «
Des cas rares
et très difficiles », conclut Alexis Tournier.