Dans un monde déchiré entre ambitions matérielles et aspirations spirituelles, Charles Kloboukoff se distingue comme une figure atypique. Intégrant une philosophie ancrée dans la coopération au sein d’une entreprise qui pèse un demi-milliard d’euros de chiffre d’affaires, ce dirigeant inspiré et inspirant a choisi de transmettre progressivement le capital à un fonds de dotation. Solidaire par nature. Mais comment ses premières intuitions ont-elles évolué jusque-là ?
Art de vivre
Studio Curty
Il y a trente ans, Charles Kloboukoff fondait Léa Nature, une entreprise pionnière dans le domaine des produits naturels et biologiques. Ce visionnaire l’a bâtie, entre autres, sur un principe novateur : « Le féminin est essentiel à l’harmonie d’une entreprise, surtout dans un secteur aussi compétitif que celui de la grande distribution. » Ce n’est pas une question de genre, mais une philosophie d’interaction avec le monde : moins d’affrontement, plus de coopération. L’entreprise s’est ainsi construite en partenariat étroit avec diverses ONG, fondations, et sphères culturelles et artistiques, dans une démarche aussi inclusive qu’innovante. Quelle a été l’étincelle qui a donné vie à Léa Nature ? Comment cette vision initiale a-t-elle évolué au fil des ans ? Et comment Charles Kloboukoff parvient-il à intégrer l’intuition et la spiritualité dans la gestion quotidienne d’une entreprise générant près de 500 millions d’euros de chiffre d’affaires et employant 2 000 collaborateurs ? Entretien au naturel.
Vous intervenez dans le film de Valérie Seguin, diffusé dès le 20 septembre 2023 sur Inexploré TV : L’intelligence intuitive et spirituelle au travail. Comment intégrez-vous cette facette au quotidien ?
Pour le comprendre, il faut d’abord expliquer d’où je viens. Je suis la troisième génération d’une famille d’émigrés russes, de souche noble, chassée par la révolution. Ma famille – qui s’est reconstruite au bas de l’échelle – était très ouverte aux sciences humaines et ésotériques, notamment par le biais de mon grand-père, qui pratiquait la radiesthésie et était sourcier, et de mon père qui était magnétiseur. Passionné par l’astrologie, ce dernier a créé, en son temps, une agence matrimoniale qui mettait en affinité les personnes via la lecture de leurs traits de caractère, en utilisant la graphologie, la morphopsychologie, etc. J’ai grandi dans cette ouverture-là. À 13 ans, ayant perdu ma mère jeune, je suis allé en pension chez les Jésuites.
Avez-vous continué à nourrir ce terreau familial, ouvert à l’extraordinaire ?
Vers 16 ans, j’ai suivi des cours du soir à l’Institut des Sciences Humaines, à Toulouse, pour décoder les schémas et réactions automatiques hérités des blessures, et leur impact sur la morphologie et les comportements. Ado plutôt inspiré, je me suis penché, via la Bible illustrée, sur les capacités du Messie à produire des événements extraordinaires. Je m’intéressais aux champs magnétiques, à l’effet Kirlian, à l’invisible… Pendant ma prépa, j’ai passé des heures à essayer d’interagir avec la matière, à passer de l’autre côté du miroir ! J’en ai conservé l’envie de me connecter à une dimension autre que rationnelle, même si ça n’a pas toujours été à l’avant-plan, selon les périodes de vie et de développement de l’entreprise.
Quelle a été l’étincelle qui a fait naître votre entreprise ?
J’ai été élevé avec l’adage : « Plus tu auras recours au médicament, plus tu en auras besoin. » L’industrie pharmaceutique est étroitement liée à l’agrochimie. Mieux vaut renforcer l’immunité. Prendre soin de soi et des autres de manière holistique, plutôt que d’agir à un endroit précis de manière physiologique. Branchée sur l’idée de faire du bien, la médecine n’était néanmoins pas pour moi ! J’ai fait une prépa HEC pour aller à l’ESG Paris et découvrir le monde. Je suis ensuite parti rejoindre des amis en coopération, chez les Volontaires du Progrès, en Afrique et en Haïti, avant d’être embauché par Intermarché pour mettre en place notamment les premières gammes de compléments alimentaires et des produits diététiques. J’ai découvert un univers connecté à la prévention santé. Fort de cette appétence pour la naturopathie et la santé holistique, j’ai créé en 1993, à la trentaine, L.É.A. – Institut Vital, spécialisé dans les compléments alimentaires et produits de phytothérapie. À l’origine, L.É.A. signifiait : Laboratoire d’Équilibre Alimentaire. J’étais porté par la foi que la médecine naturelle, alors en perte de vitesse, pouvait connaître un nouvel essor.
Au départ, votre démarche ne paraissait-elle pas un peu ésotérique ?
C’est amusant : votre question me rappelle qu’au début de Léa Nature, j’ai passé beaucoup de temps dans les grimoires du Moyen Âge et dans les livres de recettes de l’Antiquité pour l’assemblage des plantes – devenu illégal sous Pétain avec l’abolition du diplôme d’herboristerie. Pour faire une infusion, nous n’avions plus droit à l’époque qu’à sept plantes : tilleul, oranger, verveine, menthe, etc. Mais si l’on remonte plus loin dans le temps, ceux qui utilisaient les plantes pouvaient être jugés pour sorcellerie. Aujourd’hui encore, notre société ne reconnaît pas toujours ces approches parallèles qui ne rentrent pas dans le cadre de la science et de la médecine. Lorsque j’ai démarré, il y a 30 ans, il n’y avait pas de champ réglementaire pour expliquer les bénéfices de ces produits, on n’avait pas le droit aux allégations de santé. Il fallait les faire percevoir… Ça s’est un peu affiné depuis.
J’en reviens à la dimension spirituelle : comment participe-t-elle à votre management ?
Je l’intègre plutôt en sourdine, car tout le monde n’est pas ouvert à ça. Il faut pouvoir expliquer de manière rationnelle et en langage d’entreprise les décisions que l’on prend en matière d’investissements, de mises sur le marché, etc. Par contre, je suis toujours guidé par cette forme d’intuition, d’écoute des énergies. Durant quelques années, j’ai mis ces perceptions sous silence, afin de pouvoir ancrer rationnellement le développement de l’entreprise, mais j’ai été rattrapé…
Quel a été le déclencheur ?
L’entreprise ayant pris de l’ampleur, je me suis remis en éveil, à la cinquantaine. Cette envie a été ravivée par les rencontres avec des personnes entretenant une spiritualité élevée, dans des domaines où la philanthropie de l’entreprise m’avait guidé (des artistes, écrivains…). Je me suis rendu compte que je captais à nouveau les énergies, positives ou perturbatrices, quand je rentrais dans une assemblée. J’ai également réalisé que la soif de conquête que je pouvais avoir comme entrepreneur était davantage guidée par une volonté de liberté et d’autonomie, afin de pouvoir entreprendre des choses, avec des voies alternatives et atypiques dans le modèle de construction de l’entreprise. Tout ça m’a fait prendre conscience que je faisais un transfert de la quête de spiritualité à travers la réalisation de l’entreprise. Ce nouvel équilibre m’a permis de me détacher de l’aspect matériel de la réussite.
Cette prise de conscience est-elle à l’origine du fonds de dotation, auquel vous allez transmettre progressivement le capital de Léa Nature ?
Oui, réaliser que je faisais ce transfert-là et que je n’utilisais qu’une partie infime de la ressource dont je dispose m’a montré qu’à travers la voie entrepreneuriale existe la possibilité de transformer et de pérenniser le groupe au service du bien commun. Tout en réalisant les objectifs économiques, d’évoluer vers une notion d’entreprise bienfaisante, en soutien à des causes variées : économie alternative, action sociale, accès à la santé… Le Fonds de soutien aux initiatives citoyennes utopiques et solidaires (F.I.C.U.S Fondaction) que nous avons créé en 2021, en famille, va ainsi progressivement prendre le contrôle de Léa Nature, jusqu’à devenir son principal actionnaire. Avec un nouveau modèle de gouvernance, en cours de réflexion.
Quelle est la place de la vulnérabilité dans votre gouvernance : montrez-vous vos failles pour autoriser celles des autres ?
Oui ! Il est essentiel de ne pas se raconter une autre histoire que celle que l’on vit. De révéler les qualités et les défauts : les siens et ceux de l’organisation ! D’être dans la transparence dans la gouvernance pour que tout le monde ait conscience des enjeux. J’aime bien la philosophie japonaise, les méthodes d’amélioration continue qui partent du principe que de petites améliorations progressives peuvent se traduire par des progrès notables. À partir d’un état des lieux objectif, on s’organise en termes de priorités sur ce que l’on veut faire progresser. En pleine conscience les uns les autres de cela, et de qui nous sommes.
Après avoir aiguisé son art journalistique en qualité de rédactrice en chef de divers magazines belges, Carine Anselme décide un jour de ne plus tremper sa plume que dans ce qui la touche au plus profond de son être et qu’elle rassemble sous le vocable « écologie humaine ».
De « Psychologies magazine » (édition belge) à « Bioinfo », en passant par « Gael », « Nest » ou encore « Terre Sauvage », elle est devenue une journaliste incontournable sur tous les sujets qui touchent aux médecines altern ...
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