Mireille Darc vient tout juste de nous quitter. L’INREES a donc souhaité lui rendre hommage. Deux opérations à cœur ouvert, une expérience d’amour aux frontières de la mort, une révélation médiumnique sur son enfance… Rencontre surprenante avec une femme extraordinaire.
Au-delà
Olivier Seignette
Actrice, réalisatrice, au-delà de sa carrière extraordinaire, Mireille Darc est aujourd’hui une « survivante », pour reprendre le mot qu’elle utilisa elle-même pour se qualifier, en mars 2013, après sa deuxième opération à cœur ouvert. Une opération qui fut pour elle le théâtre d’une étrange expérience pleine d’amour, aux frontières de la mort, et qui lui permit également de se préparer à la perspective de sa propre disparition. La mort qui avait déjà été présente dans sa vie, en 1989, lorsqu’elle perdit son compagnon Pierre Barret. Une épreuve qui l’avait laissée pleine d’interrogations : comment comprendre ce lien avec Pierre qu’elle continuait de ressentir ? Ces signes, parfois ? D’autres phénomènes inexpliqués jalonnent encore aujourd’hui la vie de cette femme curieuse de tout et ouverte à l’invisible. Le plus incroyable sans doute se produisit en 2007 lorsqu’elle découvrit que son vrai géniteur s’appelait Edmond, et était mort en Indochine durant la Seconde Guerre mondiale. Le plus curieux de l’histoire est que c’est ce même père, mort un demi-siècle plus tôt, qui lui aurait fait ces révélations, par l’intermédiaire d’une médium.
Qu’est-ce que la mort représente pour vous ?
Elle m’a longtemps fait peur. Et puis, il y a 25 ans, j’ai accompagné mon compagnon jusqu’à son dernier souffle. J’ai eu l’impression qu’une partie de moi s’en allait avec lui et l’accompagnait si loin qu’il m’était vraiment très difficile de revenir. Je n’étais pas triste de la mort elle-même, mais en manque de l’autre. Aussi, j’ai essayé de continuer à lui parler, comme s’il était là, comme s’il continuait à être mon compagnon. Et ça m’a beaucoup aidée, parce que j’avais l’impression qu’il répondait par moments, à travers des signes notamment.
Quel genre de signes par exemple ?
Je marchais dans la rue, et tout à coup je voyais par terre un valet de cœur, et je me disais : c’est mon amoureux qui pense à moi. Ou alors, parfois en m’endormant, une commode qui se trouvait dans ma chambre se mettait à craquer. J’avais l’impression que ce meuble n’avait jamais craqué avant. Cette sensation de n’être pas seule et que l’on continuait à m’entourer était très forte. J’ai commencé alors à percevoir la mort comme un simple éloignement physique.
Vous aviez l’impression de percevoir la présence de votre compagnon ?
Oui, tout le temps. J’étais en communication permanente avec lui… Par des bruits, des signes, des odeurs aussi. Je percevais subitement des effluves du parfum qu’il utilisait. Ça me mettait dans des états de bonheur total.
Est-ce que vous pensez parfois à votre propre mort ?
Oui, beaucoup, surtout au moment où j’ai dû être opérée. À l’époque de ma deuxième intervention, j’avais déjà fait ce documentaire sur la mort et rencontré beaucoup de gens qui avaient vécu des expériences de mort imminente, aussi j’avais eu toute une évolution personnelle par rapport à « l’après ». J’avais moins peur, et j’avais accepté. C’est le mot : accepter de quitter les gens qu’on aime. Aujourd’hui, la mort ne me fait pas tellement peur. Le jour où je partirai, je laisserai tout ce qui est autour de moi, aussi j’ai déjà appris à lâcher : brûler toutes mes photos, ne pas laisser de valises pleines de souvenirs… Ce qui m’embête le plus, c’est de laisser les autres, mon mari. C’est ça la douleur : laisser l’autre seul. Ma mort ne me fait pas peur. Je pense que de l’autre côté, une fête m’attend.
Une fête ?
Beaucoup d’amis sont morts. Je les sens autour de moi. Ils seront là.
Avez-vous ce sentiment d’être reliée à des choses invisibles ?
Oui. J’ai l’impression d’être tout le temps reliée.
Que s’est-il passé le 13 mars 2013, lors de votre deuxième opération à cœur ouvert ?
Le réveil a été un peu compliqué, je ne voulais pas tellement revenir. Je sentais qu’on essayait de me ramener, mais moi j’étais bien, dans une paix, dans de la douceur, il n’y avait pas de douleur. J’entendais des mots d’amour et je ne cessais de répéter : oui je t’aime, je t’aime, je t’aime, je t’aime. C’était un échange d’amour… J’avais le sentiment que ces paroles s’adressaient à Pierre Barret. Je ne peux pas dire que je l’ai vu, mais j’ai senti une sorte de présence… Et pendant toute l’opération, je lui ai parlé. Je ne sais pas si je faisais une EMI, mais en tout cas il était là et je discutais avec lui.
Était-ce similaire à un rêve ?
Non, c’était plus présent qu’un rêve. J’étais dans quelque chose que je vivais vraiment. Mais cela a-t-il de l’importance de savoir la vérité ?
Et la vôtre, de vérité, c’est quoi ?
J’étais bien avec lui, c’est ça qui compte, il m’a sécurisée, il m’a donné de la chaleur, de l’amour, c’est ça qui compte dans la vie, non ? Après, de savoir que c’était une EMI ou autre chose, je n’en sais rien. J’étais dans une sorte d’ouate. Une bouffée d’amour m’était donnée, et m’inondait…
Ce n’est pas facile à décrire…
Non. Mais « bouffée d’amour », c’est tout à fait ça.
Je voudrais en venir à votre enfance, car il s’y trouve un secret qui vous sera révélé dans des circonstances très étonnantes, en 2007 : le père qui vous a élevée n’était pas votre papa biologique.
Oui, il ne s’occupait pas de moi. Aujourd’hui, j’ai réussi à comprendre qui était qui, et que les autres aussi ont souffert en même temps que moi, mais à l’époque, j’étais une enfant, et je n’ai jamais pensé une seule seconde que j’en étais responsable.
Ce que vous ignoriez à l’époque, c’est que votre mère avait eu une aventure amoureuse, que vous en étiez le fruit de cette aventure, que celui que vous appeliez votre père ne l’était pas biologiquement… et que lui le savait.
C’était un homme jaloux et possessif, et il était profondément blessé.
Il vous rendait responsable de son malheur… Il a même été jusqu’à vous dire qu’il voulait se tuer à cause de vous…
Oui, il voulait se pendre, il m’emmena dans le grenier et me dit qu’il voulait se pendre à cause de moi.
Quel impact cela a-t-il eu sur vous, à 7 ans, et par la suite ?
Je l’ai supplié de ne pas le faire. Mais sans doute devais-je le vivre… car, finalement, aujourd’hui ça m’a enrichie d’une certaine manière, ça m’a donné de la force. Je sais ce que ça veut dire d’être seule, d’être abandonnée. Quand je suis arrivée à Paris, je ne connaissais personne, j’arrivais de Toulon, je n’avais pas énormément d’instruction ni de moyens financiers, il fallait se battre…
Est-on obligé d’en passer par là pour être costaud dans la vie ?
Non, mais si vous devez y passer, vous y passez. Un enfant, ça ne recule pas.
Mais avez-vous conscience qu’un père qui fait peser sur son enfant une telle culpabilité, la traite de bâtarde, ça peut aussi détruire toute confiance en soi...
Il y a 2 solutions : ou vous vous écroulez, ou vous vous donnez un coup de pied aux fesses, voilà. Moi, je me suis donné beaucoup de coups de pied aux fesses dans ma vie, beaucoup. Je ne me sens pas victime.
Mais la culpabilité ? Parce qu’après que votre père vous ait fait cette menace, vous n’en avez parlé à personne ?
Non, je n’en ai plus parlé à personne. Vous savez, c’était une époque où l’on ne parlait pas. Ma mère n’aurait pas compris, je pense qu’elle n’aurait pas osé s’opposer à mon père, et puis ça lui aurait fait de la peine. Je sentais que je pouvais lui faire du mal en le lui disant.
C’était de la culpabilité, alors ?
Oui, peut-être, mais quand vous êtes enfant, vous ne savez jamais très bien ce qui est juste, et ce qui ne l’est pas. Et moi, je vivais dans un contexte où l’on ne m’ouvrait aucune porte. Il valait mieux que je la ferme.
Est-ce que l’injustice que vous avez connue dans l’enfance a contribué à nourrir des peurs… A-t-elle laissé une blessure importante ?
Plus aujourd’hui, plus depuis ce livre [Mon père]... Vous voyez, je dis mon père quand je parle de l’homme qui m’a élevée… mon histoire est bouclée.
En même temps, vous l’affrontez, ce passé, vous le regardez en face.
Je ne vais pas non plus le cacher. Vous m’en parlez, alors je vous en parle, mais il faut être vigilant : le passé, c’est piégeant aussi. Il peut vous retenir en arrière, vous scotcher sur place.
Pensez-vous que l’on puisse guérir de toutes les blessures ?
Non, pas de toutes les blessures, mais on peut essayer. Je crois que si l’on donne beaucoup d’amour, on est déjà à moitié guéri. Il faut avoir la force, aussi… Oui, il faut avoir la force.
Ce qui est très stupéfiant avec votre histoire, c’est la façon dont vous avez définitivement éclairé les zones d’ombre de votre enfance : un jour, une médium est apparue dans votre vie avec un message de votre maman décédée 10 ans auparavant…
C’est ça.
Et votre mère vous avoue alors : « Ton père n’était pas ton père. »
Exactement. Et ce qui est étonnant, c’est que de son vivant, j’avais dû lui demander 20 fois qui était mon père, parce que je sentais d’une certaine façon qu’il n’était pas possible que cet homme soit mon père. Je n’avais rien en commun avec lui. Mais elle m’avait toujours répondu que c’était lui.
Vous allez voir cette médium à une autre reprise, et alors c’est votre père biologique qui apparaît. Et là, c’est très troublant pour l’esprit cartésien que je suis, car à cette occasion, votre papa s’exprime pour la première fois devant vous et donne de nombreux détails que vous allez constater plus tard…
Qui sont justes, tout à fait.
C’est quand même tout à fait bluffant !
Oui. Par l’intermédiaire de la médium, mon papa m’a parlé d’une bataille navale précise que les Français auraient gagnée contre les Japonais. Il m’a dit qu’il était sur tel bateau y ayant participé. J’ai cherché la bataille, j’ai passé une nuit entière sur Internet, et au fur et à mesure, j’ai découvert ces détails de la guerre. Et c’est vrai, j’ai découvert que tout ce qu’il m’avait dit s’était produit : le fait d’avoir été prisonnier, le Mékong, etc.
Ce n’étaient pas des choses dont vous aviez parlé auparavant avec la médium ?
Je ne savais même pas que les Français s’étaient battus contre les Japonais. Je crois même que la médium n’était pas au courant non plus.
Comment s’est déroulée la séance ?
J’étais sur un canapé en face d’elle. Et d’un seul coup, elle était dans une sorte d’état de transe et disait être en connexion. Alors j’ai posé des questions, et elle a répondu comme si on était au téléphone. Ça avait l’air simple, et en même temps ça ne l’était pas. Malgré tout, je ne cessais de me poser la question : est-on vraiment en connexion ? J’étais toujours dans le doute par rapport à ça, mais je crois qu’elle l’était aussi.
Quelle était votre sensation ?
Je vous le dis : j’étais dans un doute total. Et en même temps, elle me donnait tellement de détails, d’éléments qui, je l’ai découvert par la suite, étaient exacts. Elle a parlé de bateaux que je ne connaissais pas, et dont je n’ai découvert l’existence qu’après, lorsque j’ai fait ces recherches sur Internet. De cette unique victoire navale française à cette époque-là, victoire dont je ne savais rien. Donc ça a été très troublant. La médiumnité reste une expérience très troublante à mes yeux.
C’est quelque chose qui a été décisif aussi dans votre vie ?
Oui. Aussi parce que d’autres personnes ont vécu ça. C’est pour cela que j’accepte aussi d’en parler : pour que l’on arrête de se moquer de ce type de choses inexpliquées. On s’en moque encore trop. Je n’ai pas d’autre message que celui-ci : laissons ouverte la porte des possibilités.
Vous pensez qu’il y a une vie après la mort ?
Je ne sais pas. Mais en même temps, j’ai tellement de signes autour de moi que je ne peux pas douter une seconde qu’il n’y ait pas quelque chose après. Maintenant, parler du paradis… Non, je ne sais pas. Après la mort, je vais retrouver des… des êtres ? Peut-être des énergies ? Peut-être des éclats de rire ?
Écrivain et réalisateur, Stéphane Allix est devenu journaliste en rejoignant clandestinement, à 19 ans, en 1988, les résistants afghans en lutte contre l’occupant soviétique. Durant les années 90, il a voyagé à travers le monde, couvert plusieurs guerres, réalisé des films, et écrit plusieurs livres.
Depuis 2003, il est engagé dans l’étude et la recherche sur les conséquences de la révolution scientifique en cours, avec une approche comparée de disciplines telles que la psychia ...
À
retrouver
dans
Inexploré n°25
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