L'Auteur
Françoise BONARDEL
Philosophe et Essayiste
Philosophe et essayiste française, Françoise Bonardel est Professeur émérite à l’Université de Paris1 Panthéon-Sorbonne où elle a enseigné la philosophie des religions durant de nombreuses années. Agrégée de philosophie, elle est titulaire d’un doctorat d’Etat es-lettres et sciences humaines portant sur la présence de la pensée alchimique dans la culture moderne et contemporaine. Membre de l’Institut d’Etudes Bouddhiques (IEB) depuis 2001, elle y donne des cours sur l’acculturation du bouddhisme en Europe et ses relations avec la philosophie occidentale.
Auteur d’une quinzaine de livres alliant philosophie et poésie, réflexion sur la religion et sur l’art, elle s’inspire également des traditions anciennes (hermétisme, gnose, alchimie) auxquelles elle a consacré plusieurs essais dont
La voie Hermétique et
Philosopher par le feu : Anthologie de textes alchimiques. S’intéressant à la question de la « transmutation » – de la matière, de la psyché et des valeurs – elle a trouvé matière à réflexion dans l’oeuvre novatrice de Carl Gustav Jung, et a publié fin 2017
Jung et la Gnose , où elle met en lumière ce qui, dans la Gnose, a pu influencer la mise en œuvre de la psychologie analytique.
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(Photo : Rita Scaglia)
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Par Françoise Bonardel
Médecin de l'âme et homme de culture, Carl Gustav Jung (1875-1961) s'est intéressé à la gnose dès les années 1910 alors qu'il effectuait des recherches sur les mythologies, mystères et croyances populaires. Son intuition lui disait que cette littérature étrange et difficile détenait un trésor d'images
symboliques dont il lui fallait comprendre la signification. Peu après confronté à une crise intérieure
(1913) dont il fit le récit dans Le Livre Rouge, Jung en vint à considérer les gnostiques comme les premiers explorateurs de l'inconscient, découvrant le monde des archétypes qui leur inspira leurs visions et leurs mythes.
Comme les alchimistes plus tard, ces visionnaires l'ont souvent guidé dans l'élaboration de la psychologie analytique, « gnostique » en ce qu'elle restitue une plénitude de sens à la vie désorientée de l'homme contemporain. Jugées hérétiques par les premiers auteurs chrétiens, les gnoses dont l'origine est incertaine (Syrie, Iran, Judée ?) laissaient libre cours à l'imagination créatrice et avaient du salut une vision aussi proche des initiations antiques que du christianisme. Valorisant la découverte de soi à travers l'expérience personnelle du divin, leur enseignement ne pouvait laisser Jung indifférent. Fût-il lui-même « gnostique » comme l'en accusèrent Martin Buber et certains théologiens chrétiens ? S il le fût, c est à sa manière : afin de répondre
aux exigences spirituelles de son temps désireux de « savoir » plutôt que de croire.